Hassan El Fad repart en tournée avec «Docteur Escargot», un one-man-show qui a toujours le vent en poupe. Entre-temps, l'humoriste prépare un standing-up qui ne manquera pas de faire recette. Entretien. ALM : Vous entamez, le 30 mars à Casablanca, une nouvelle tournée avec le spectacle « Docteur Escargot ». N'avez-vous pas de nouveauté à présenter en 2007 ? Hassan El Fad : Je suis dans un marché de l'art en panne de mouvement. Nous ne sommes pas en France où l'on fait plus de deux cents dates par saison. Au Théâtre de la Huchette de Paris, il y a «La Cantatrice chauve » qui est jouée tous les soirs depuis des générations. Au Maroc, on ne peut pas jouer un spectacle suffisamment, alors on est obligé de le reconduire les saisons suivantes. «Docteur Escargot» a fait salle comble à six reprises l'an dernier à Rabat, il a drainé le grand public le 17 février 2007 à la même ville. Et si quelqu'un le reprogramme à Rabat, je suis sûr que bon nombre de personnes iront le voir. Pourquoi le public en redemande-t-il ? «Docteur Escargot» a-t-il une recette particulière ? C'est un spectacle plaisant et, sans aucune prétention particulière, il est simple, sobre, techniquement minimaliste et crée une certaine proximité, voire une interactivité avec la salle, dans le sens où il y a certains passages où le spectateur s'identifie à la situation, aux personnages… Il y a un sentiment de complicité qui s'installe entre la scène et la salle, surtout au début du spectacle. Et moi-même, je m'oublie assez souvent sur des digressions où je charrie retardataires, téléphones portables qui sonnent ; en somme, je récupère, autant que je peux, tous les écarts de civilité éventuels dans la salle. Et c'est un exercice d'interprétation très intéressant parce qu'il fait du texte originel un simple canevas de prétextes pour aller sur scène et donner de larges marges à l'improvisation. D'autre part, le spectacle offre un panel de personnages divers conciliant réalisme et absurdité. Ainsi, on va du personnage fréquemment rencontré dans notre quotidien comme le gardien de voitures mythomane qui embarque le public dans un délire où il s'auto-héroïse ; c'est un délire auquel le public adhère sans réserve. Ce n'est qu'après que «Docteur Escargot» revient pour illuminer la salle avec son exposé savant sur, tenez-vous bien, l'anthropologie du mollusque. Il vient donc poser son commentaire châtié sur une bestiole triviale. Encore une petite pause, et Tarek Ibn Zyad surenchère avec un voyage dans le temps et l'espace. Embarquement pour l'Andalousie du 8ème siècle. Et l'on ferme la parenthèse par un retour à la réalité avec une Hajja sexagénaire qui adopte des airs d'écolière après un retour tardif et passionnel à l'école. Avez-vous idée de votre prochain spectacle ? Ce ne sera pas un one-man-show, mais un standing-up. Et donc le spectacle sera moins théâtralisé. Ce sera un rapport terre-à-terre avec le public. Certaines parties de ce spectacle sont déjà écrites, c'est une balade entre des thèmes, des sujets, des personnages et des situations inspirées de notre vécu. Le spectacle va tourner autour du Marocain d'aujourd'hui. Comment vivez-vous votre statut d'humoriste dans la rue ? Je le vis selon l'humeur dans laquelle je me trouve. Quand il s'agit d'un simple regard, ou d'un commentaire qui émane de loin, je salue avec gêne des fois, et d'autres fois, je fais comme si de rien n'était. Par contre, quand quelqu'un m'aborde directement, cela dépend de l'affinité qui se crée ou ne se crée pas. Quand je ne suis pas bien, j'essaye d'écourter la rencontre pour camoufler mon humeur. Par ailleurs, j'ai des moments où c'est moi qui suis extraverti et exubérant, pour ne pas dire bavard. Quand on n'est pas chaleureux avec quelqu'un par inadvertance, on est systématiquement étiqueté «arrogant». Les élections de 2007 vous inspirent-elles l'idée d'un spectacle ? Pour l'instant, je n'ai que le projet d'aller voter. J'attends de voir les programmes des uns et des autres. Un humoriste doit-il appartenir à un parti politique ? Pour ma part, le choix est déjà fait. J'ai le cœur à gauche, je mange avec la droite et j'ai la tête au centre. Que pensez-vous de l'état de l'humour au Maroc ? Je crois qu'il y a de petites percées techniques, des recherches sur des formes d'humour inexplorées. Je peux citer les premiers spectacles de Saïd Nacéri, ainsi que ses débuts au cinéma; ajouter à cela l'apparition de la parodie dans l'audiovisuel marocain avec l'expérience de Hanane Fadili ; la hardiesse de Mohamed El Khyari sur certains thèmes ; sans oublier évidemment le retour sur le plan médiatique d'Abderraouf qui est en soi une réconciliation de la mémoire collective avec ses icônes. Ceci dit, sur le plan thématique, il y a toujours une prédominance du contenu rural en ville. Je me demande si cela ne ressemble pas à la société. En somme, nous n'avons que l'humour que nous méritons. Programme de la tournée Hassan El Fad en tournée avec «Docteur Escargot», du 29 mars au 7 avril. Ci-dessous le plan de tournée : 29 mars, au Mégarama de Casablanca 30 mars, au Théâtre municipal d'El Jadida 5 avril, à Khouribga 6 avril, à Kénitra 7 avril, à Meknès