Depuis l'annonce d'un éventuel redéploiement de la gendarmerie algérienne en Kabylie, la tension est à son extrême. Plusieurs délégués des Aârchs, dont le chef du mouvement, Belaid Abrika, ont été interpellés. Le climat devient de plus en plus tendu en Kabylie et ce depuis l'annonce par le wali de Tizi-Ouzou d'un projet de redéploiement de la gendarmerie algérienne dans cette zone. L'annonce avait provoqué la colère des Aârchs qui rejettent de façon catégorique l'idée d'un retour des gendarmes en Kabylie cinq ans après les événements sanglants du «printemps noir». Les autorités algériennes ont procédé récemment à une série d'arrestations visant plusieurs délégués Aârchs, rapporte jeudi la presse locale. Parmi eux, figure le chef du mouvement kabyle, Belaid Abrika, arrêté mercredi par la police à Tizi-Ouzou pour «destruction des biens publics», indique le quotidien "Liberté d'Algérie". M. Abrika a été interpellé avec deux de ses proches collaborateurs Ahmed Amour et Hamenad Yougourta, après que plusieurs citoyens aient procédé, durant la nuit de dimanche à lundi dernier, à la destruction d'une plate-forme servant de socle pour la construction d'une roulotte de gendarmerie, érigée à Sikh-Oumedour, banlieue périphérique à l'est de la ville de Tizi Ouzou (160 km à l'est d'Alger). Après avoir répondu aux questions des enquêteurs, Abrika a été relâché, poursuit le journal. Belaid Abrika ne s'est fait un nom qu'après les événements du printemps 2001 qui avaient ensanglanté la Kabylie. Hostile dans un premier temps à tout dialogue avec le gouvernement, il avait appelé au boycott des élections législatives de mai 2002 et municipales d'octobre 2002. Arrêté le 24 octobre de la même année, il sera libéré en mars 2003. En 2004, il accepte le dialogue avec le gouvernement. L'une des principales revendications des citoyens de cette région était le retrait des forces de l'ordre. Actuellement, les Aârchs ne cachent pas leur hostilité au redéploiement de la gendarmerie. Mais ils affirment, toutefois, que les trois délégués arrêtés n'ont pas pris part à la démolition de la plate-forme de la gendarmerie. Et ils justifient leur action par l'engagement de l'Etat à retirer toutes les brigades de la gendarmerie de la Kabylie coupables d'avoir assassiné 121 jeunes manifestants désarmés au printemps 2002. Dans une récente déclaration, les Aârchs ont pris les devants pour exprimer leur position sur la question du retour de la gendarmerie et ont averti des conséquences néfastes que pourraient induire ces manœuvres machiavéliques et dangereuses. Les délégués appréhendent la multiplication des «dérapages du pouvoir», dans son processus qui vise à «imposer le retour des gendarmes en Kabylie», a écrit jeudi "La dépêche de Kabylie". La CADC (Coordination des Aârchs des Daïra et Communes de Tizi Ouzou) a souligné mercredi dernier que : «ces arrestations arbitraires marquent une escalade dans la provocation à l'égard des citoyens de la région et laquelle vise à imposer le retour du corps de la gendarmerie contre la volonté manifeste de la population et en violation des engagements contenus dans l'accord global, signé le 15 janvier 2005, et qui engage l'Etat à la mise en œuvre de la plate-forme d'El-Kseur». Le Printemps Noir Le Printemps Noir est le nom donné aux violentes émeutes qui ont éclaté en Kabylie et à leur répression par l'armée algérienne entre avril 2001 et avril 2002. Tout a commencé lorsqu'un jeune lycéen a été assassiné le 18 avril 2001 par une brigade de la gendarmerie. Une bavure qui a mis le feu aux poudres. Des marches sont alors organisées pour dénoncer les injustices et les abus d'autorité. Ces manifestations sont durement réprimées. Ces évènements plongeront, pendant trois ans, la Kabylie dans l'engrenage des émeutes et de la répression. Le bilan s'élève à 126 morts et des centaines de blessés.