Après 47 ans de "discrimination", la France vient d'aligner les pensions des anciens combattants étrangers avec celles de leurs homologues de l'Hexagone. 15 000 Marocains sont concernés par cette revalorisation. La France fait son mea-culpa vis-à-vis des anciens combattants des ex-colonies. Le jour même de la sortie du film "Indigènes", mercredi dernier, le Conseil des ministres a décidé d'aligner les montants des pensions militaires d'invalidité et des retraites de ces ex-combattants étrangers de l'armée française sur celles de leurs homologues de l'Hexagone. Au total, près de 80 000 anciens soldats coloniaux de 23 pays bénéficieront de cette mise à niveau des pensions dont 15 000 Marocains. La décision, qui sera introduite dans le projet de loi de Finances pour 2007 via un amendement gouvernemental, s'appliquera dès le 1er janvier 2007. Toutefois, la revalorisation ne concernera que les retraites et les pensions militaires d'invalidité. Qu'en serait-il des ayants droit ? La question reste sans réponse pour le moment. En outre, cette mesure ne sera toutefois pas rétroactive. Le ministre délégué aux Anciens combattants était clair à ce sujet. «Un rattrapage n'est pas d'actualité pour l'instant», a-t-il fait savoir. Si certains anciens combattants ont manifesté leur satisfaction, ils restent toutefois inquiets quant aux modalités de versement des pensions. A signaler par ailleurs que cette décision a été perçue comme une "réparation à une injustice" qui a duré depuis 1959. Les pensions des vétérans étrangers furent bloquées sitôt les indépendances des anciennes colonies françaises acquises. C'est ce qu'on avait appelé la cristallisation. Pour leur part, les pensions des anciens combattants français avaient continué à être revalorisées. Cette inégalité a été dénoncée à maintes reprises. En 1980, près de 700 anciens combattants avaient porté plainte pour discrimination raciale devant la Commission des droits de l'Homme de l'ONU et obtenu gain de cause contre la France. En 2001, le Conseil d'Etat français avait rendu un arrêt condamnant la France à verser à Amadou Diop, un tirailleur sénégalais, une pension établie au même taux que celui en vigueur pour les Français et à lui payer les arriérés dus. Cependant, Amadou Diop, à l'instar d'autres anciens combattants, est décédé avant d'avoir pu bénéficier de cette décision des tribunaux. Une année après ce jugement, le gouvernement a décidé de "décristalliser" partiellement ces pensions avec un paiement calculé en fonction du niveau de vie de chaque pays. C'est à cette dernière mesure que la décision d'égalisation des pensions entre les anciens combattants français et étrangers va mettre fin.