La musique “fusion” attire de plus en plus un jeune public. Mais le phénomène ne semble pas intéresser producteurs et sponsors. Une situation que déplorent nombre d'adeptes de ce style musical. Vendredi dernier au complexe Mohamed Zefzaf à Casablanca, deux nouveaux groupes de fusion, «Sy Mehdi» et «Haoussa», pas très connus du grand public, animent un concert. Hafla est le titre de ce spectacle que le manager Maurice El Baz, directeur d'une entreprise d'événementiel souhaite faire une tournée à travers plusieurs villes du Maroc. Ce producteur croit en cette musique et désire la promouvoir à travers plusieurs spectacles et tournées. Le problème qui se pose serait pour l'instant celui de l'absence de sponsors. «Cette musique ne réussit pas encore à attirer les sponsors car ils n'ont pas encore confiance en elle» explique Maurice El Baz. Le manager revient en fait sur la mentalité qui règne chez les bailleurs de fonds. Des financiers qui, selon lui, réfléchissent toujours en termes de retour sur investissement. Pourtant, depuis la création du boulevard des jeunes musiciens en 1999 la fusion a fait ses preuves. « Le jeune public marocain évolue vers cette musique et on assiste aujourd'hui à la naissance de nouveaux groupes », ajoute le manager. Même son de cloche du côté de Mohamed Merhari, fondateur du Boulevard des jeunes musiciens. «Lors de la première édition, nous avions rassemblé environ 400 personnes et à la huitième édition en 2005, nous sommes arrivé à enregistrer 160.000 spectateurs», a-t-il déclaré. Une preuve que cette musique plaît. Le public, en tout cas, ne cache pas sa satisfaction. Il faudrait aujourd'hui savoir si les producteurs s'intéressent et sont prêts à prendre le risque de financer et de distribuer les albums. Sur cette question, les avis différent. Certains croient à la naissance d'un véritable intérêt pour cette musique «new génération», d'autres par contre ont du mal à s'y faire. «Il n'y a pas de producteurs, malgré le succès grandissant de tous les groupes de fusion, il n'y a que la variété qui marche», souligne Réda Allali, le guitariste de la formation célébrissime Hoba Hoba Spirit. Ce groupe qui a vendu 4000 exemplaires de son premier album en quelques mois, est clair. «Jusqu'à présent les producteurs sont rares voire inexistants». Le risque se situerait ici sur le plan des bénéfices. «C'est une question de mentalités, la plupart des producteurs ont des réflexes mercantiles. Face à cette situation nous avons compris depuis longtemps qu'on devait nous-même financer nos albums». Si la renommée et la popularité de Hoba Hoba Spirit ont été établies c'est surtout grâce aux efforts de ses propres membres. «Cela fait longtemps que nous avons dépassé le cap et que nous cessons de croire à l'illusion qu'un jour un producteur viendra nous proposer son aide», ajoute le guitariste. Le créateur du boulevard emboîte le pas à Reda Allali. Son avis est similaire : «Nous sommes passé aujourd'hui de l'amateurisme à l'auto-production» une façon de signifier haut et fort que les producteurs en bonne et due forme n'existent pas encore au Maroc. «Ils pensent tous au bénéfice, ils ne sont pas encore conscients de l'intérêt de cette musique ». Tifa Bourjouane, chef de produit chez une maison de disque à Casablanca, est plutôt optimiste. « Les groupes de fusion sont encore à leurs débuts, on s'y intéresse, mais nous ne pouvons pas non plus produire toutes les formations existantes». Pour cette responsable, il suffit juste d'un peu de temps pour que cette musique passe de l'underground à un circuit bien structuré. Une façon pour ce style de s'affirmer davantage et de mériter la confiance aussi bien des sponsors que des producteurs.