En défiant la communauté internationale, l'Iran se livre un véritable jeu de poker qui risque de créer une nouvelle crise dans une région extrêmement sensible. L'étau se ressert autour de Téhéran après que les cinq membres permanents du Conseil de sécurité ainsi que l'Allemagne ont rédigé un texte commun demandant à l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) de saisir le Conseil de sécurité de l'ONU. Pour le moment, les sanctions ne sont pas à l'ordre du jour, même si le président américain, George W. Bush, multiplie les menaces. C'était, il y a quatre ans, en 2002, que le président américain avait placé l'Iran dans l'«axe du mal». Lors d'un discours prononcé sur «l'état de l'Union», le président Bush s'est alors adressé directement aux Iraniens : «Votre nation est l'otage d'une petite élite religieuse qui isole et opprime son peuple. (…) Le monde ne permettra pas au régime iranien d'acquérir l'arme nucléaire». Des propos que le président américain ne cessa de reprendre à chaque fois que l'occasion se présente. Usant les mêmes termes, le même ton, il faisait tout pour faire monter la pression sur le régime iranien. En 2005, l'arrivée au pouvoir du président ultraconservateur Mahmoud Ahmadinejad n'a fait que compliquer la situation et par la même occasion donner un nouveau prétexte pour le président américain de tirer la sonnette l'alarme. En décembre dernier, le président américain qualifie l'Iran de «réelle menace» et réaffirme que la République islamique faisait partie d'un «axe du mal» de pays soutenant le terrorisme et cherchant à se doter d'armes de destruction massive. Les récents développements de ce dossier épineux ne semblent guère effrayer le régime iranien. Aujourd'hui, Mahmoud Ahmadinejad, qui continue à défier les Occidentaux sans trop se soucier des conséquences d'une nouvelle crise dans une région extrêmement sensible, se livre à un véritable jeu de poker. Il place la barre des enchères le plus haut possible. Récemment, Larijani, secrétaire du Conseil suprême de sécurité iranien, a prévenu qu'une saisine du Conseil de sécurité signifierait l'arrêt des efforts pour résoudre la crise par la voie diplomatique. Certains observateurs y voient une façon indirecte de la part des Iraniens de brandir l'arme pétrolière. Ce qui risque de faire flamber les prix de l'or noir. La Russie, partenaire industriel de l'Iran, ainsi que la Chine sont toujours hostiles à une action précipitée sur ce dossier. Affaires obligent ! «Moscou a lancé une ultime tentative de négociations,» c'est ce que le président russe Vladimir Poutine a expliqué par téléphone au président américain George W.Bush qu'il a appelé jeudi dernier. Le représentant permanent de la Russie auprès des organisations internationales siégeant à Vienne, Grigori Berdennikov, a, lui, exprimé la certitude que si l'Iran acceptait la proposition de la Russie de créer une coentreprise d'enrichissement d'uranium, il pourrait satisfaire pendant longtemps ses besoins légitimes en combustible nucléaire civil. De son côté, le directeur général de l'AIEA, Mohamed Al Baradeï, veut se donner du temps au moins jusqu'au mois de mars dans l'espoir de convaincre l'Iran à coopérer avec son agence. Jeudi dernier, le Conseil des gouverneurs de l'AIEA a entamé une réunion déterminante, censée décider si le Conseil de sécurité des Nations Unies doit être saisi du dossier du nucléaire iranien. Le feuilleton est loin de toucher à sa fin. Au contraire, il ne fait que commencer!