Le Maroc a formulé des réserves sur le budget proposé aux populations sequestrées à Tindouf pour 2006 soumis à examen à Genève dans le cadre de la 34ème session du Comité permanent du Haut Commissariat pour les Réfugiés (HCR), se déclarant ne pas être en mesure de l'adopter. S'exprimant sur le point relatif aux budgets-programmes et financement, M. Azzeddine Farhane, Chargé d'Affaires par intérim de la Mission du Royaume du Maroc à Genève, a souligné que la position du Royaume trouve son explication dans le fait que le HCR s'est engagé l'année dernière à communiquer une réponse au Maroc, avant la réunion du Comité exécutif du programme du Haut Commissariat (EXCOM) relative à l'enregistrement des populations des camps de Tindouf. Or, à ce jour, le Maroc n'a reçu aucune réponse. Les autres réserves du Maroc portent sur le chiffre de 165 000 personnes dites réfugiées à Tindouf, aussi bien dans le budget programme révisé pour 2005 que le projet du budget proposé pour 2006. Ces chiffres basés sur l'estimation algérienne, depuis 1982, interpellent, en raison de leur caractère statique unique dans l'univers humanitaire, a-t-il dit. "En d'autres termes, les populations des camps de Tindouf sont les seules à ne connaître aucune évolution. Elles n'ont enregistré, depuis plus de deux décennies, ni décès, ni naissance, ni retour à la mère patrie ou déplacement dans d'autres pays", a-t-il, en outre, fait remarquer Pour le diplomate marocain l'absence de l'enregistrement de cette population est atypique par rapport à d'autres situations assistées par le HCR à travers le monde. Ces populations, a-il rappelé, n'ont fait l'objet d'aucune opération de recensement, ni avec les procédés usuels, ni par les techniques d'enregistrement les plus fiables, notamment le projet Profile, déjà opérationnel depuis deux ans dans un grand nombre de pays africains, et ce en violation des résolutions de l'Assemblée générale de l'ONU et des multiples conclusions de l'EXCOM qui appellent les Etats à procéder, sans aucun retard, à l'enregistrement des réfugiés. M. Farhane a indiqué que le Maroc dispose d'informations selon lesquelles le HCR, le Programme Alimentaire Mondial (PAM) et l'Office Européen de Lutte Anti-fraude (OLAF), sont arrivés à des conclusions qui considèrent le chiffre de 165000, estimé par l'Algérie, largement exagéré, ajoutant que le Maroc maintient sa demande pour un recensement fiable susceptible de déterminer le nombre exact et l'origine de cette population, afin d'évaluer et quantifier ses besoins réels en matière d'assistance alimentaire et partant, éviter la dilapidation de l'assistance humanitaire fournie par les donateurs dont d'autres réfugiés ont besoin. Il a, dans cet ordre d'idées rappelé qu'une recommandation du rapport de l'année dernière du Corps commun d'inspection demande au HCR "de veiller à ce qu'aucun retard indu ne soit pris dans le processus d'enregistrement ou réenregistrement des réfugiés, afin d'établir de façon exacte que possible le nombre de bénéficiaires à qui l'assistance est fournie", soulignant que cet impératif de l'enregistrement devrait "en toute logique", s'appliquer à la situation des camps de Tindouf. S'agissant des autres chapitres du budget programme proposé par le HCR pour 2006, le diplomate marocain a indiqué que le Maroc souscrit pleinement et entièrement aux prévisions présentées par le Haut Commissaire, mettant l'accent sur le mandat éminemment humanitaire du HCR et que le Maroc rejette, par conséquent, toute conditionnalité de l'humanitaire au politique qui est synonyme d'encouragement à la perpétuation du drame humanitaire dans les camps de Tindouf. "En effet, la contribution financière à la politique de ceux qui se servent du drame humanitaire des populations de ces camps, à des desseins politiques, empêche le HCR de s'acquitter de son mandat humanitaire et apolitique", a-t-il affirmé. Il a, à la fin de son intervention, exprimé "le soutien sans faille du Maroc à toute démarche ou initiative permettant au HCR de mettre en oeuvre son mandat intégral en matière de protection internationale des populations dites réfugiées dans les camps de Tindouf. Dans sa réponse, Mme Windy Chamberlain, Président-adjoint du HCR, a indiqué que des consultations diplomatiques à ce sujet ont eu lieu au plus haut niveau entre le HCR et le Maroc, soulignant que depuis le premier septembre 2004, le HCR a décidé de limiter son assistance dans les camps de Tindouf aux groupes les plus vulnérables évalués à 90.000 personnes. Le Haut Commissariat pour les Réfugiés et le PAM avaient décidé la limitation de l'aide à cette catégorie tant qu'un système d'enregistrement n'est pas établi, a-t-elle dit, soulignant que le HCR compte poursuivre ses consultations avec le Royaume du Maroc, à ce sujet.