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Le temps de l'exil (4)
Publié dans Aujourd'hui le Maroc le 05 - 12 - 2003

C'est sans doute le livre-événement de la rentrée. Passionnant, écrit dans une langue soignée, «Mohammed V, Hassan II, tels que je les ai connus» est un témoignage de l'intérieur sur le Maroc et deux de ses Souverains. Des extraits de ce livre publié par les éditions Tarik, vous seront présentés chaque week-end.
En septembre, la mère de Sa Majesté étant décédée, j'envoyai une dépêche de condoléances à son Auguste Fils.
Quelques jours après, M. De La Tour du Pin, conseiller du Gouvernement chérifien qui, par ses fonctions, était un des seuls à se trouver en relation avec la préfecture de la Corse, me fit part des sentiments d'amitié que Sa Majesté l'avait chargé de me transmettre. Je profitai de cette ouverture pour écrire le 5 septembre à M. Savreux, Préfet de la Corse, en le priant de remercier Sa Majesté des aimables pensées qu'Elle avait eues à mon égard, que mon intention était d'aller Lui rendre visite le plus rapidement possible et je l'informais que, dans ce but, je m'étais mis en rapport avec notre ami, le Comte Clauzel, du ministère des Affaires étrangères, afin qu'il insistât auprès du département pour m'obtenir le visa nécessaire.
Ces tentatives n'ayant pas abouti, je décidais de les poursuivre à Paris où j'arrivais le 19 septembre.
Depuis son accession au trône, Mohammed V avait l'habitude de partir chaque année, vers la moitié de l'été, pour la métropole. Là, il établissait son quartier général au Crillon, où il était reçu par son directeur, l'excellent M. Colas, secondé de Mme Colas qui lui manifestaient l'attachement le plus affectueusement respectueux. M. Colas avait auprès de lui, en la personne de M.Berger, un jeune collaborateur qui était appelé à lui succéder dans ces délicates fonctions. Si j'insiste sur ce détail c'est que le feu Roi était infiniment sensible à ces marques d'amitiés, spontanées et désintéressées qui lui étaient témoignées, au hasard des rencontres, par de nombreux Français. Elles compensaient, heureusement, l'incompréhension qu'il lui arriva si fréquemment de rencontrer, chez d'autres Français, au cours de son règne.
Me rendant au quai d'Orsay, je me mis en rapport avec M. Jacques Vimont, que j'avais connu à Rabat alors qu'il était conseiller du Gouvernement chérifien, et qui exerçait à l'époque les fonctions de directeur du cabinet du ministre des Affaires étrangères.
Je lui fis part de mon désir de me rendre en Corse et lui remis une note destinée à son ministre :
« Entré au Palais royal en octobre 1937, le signataire de ces lignes en est resté le familier jusqu'au 20 août 1953.
Au cours de ces seize années, il n'a cessé d'entretenir avec Sa Majesté Sidi Mohammed Ben Youssef des relations d'amitié qui se sont renforcées au cours des années.
Pendant seize ans, il eut l'honneur de dîner régulièrement, tous les lundis, en tête-à-tête avec le Souverain ; il l'a accompagné dans ses voyages officiels en France en 1939, 1947 et en 1950, ainsi que dans les déplacements également officiels qu'il lui arrivait de faire à travers son Royaume. L'ayant opéré non seulement lui-même mais également ses fisl, ainsi que plusieurs membres de sa famille, il fut admis dans son intimité familiale, et il paraît qualifié et autorisé à fournir quelques précisions sur les réactions d'un homme qu'il a eu l'occasion d'approcher de près et de connaître si longtemps ».
C'est par ces propos que débutait la note que je faisais parvenir à Georges Bidault, afin qu'il m'autorisât à me rendre en Corse où Sa Majesté avait été déportée. Si je tenais à apporter de telles précisions à M. Georges Bidault, c'est que j'étais, du fait des hasards de ma profession, un des seuls Français à bien connaître le Sultan qui, pour presque tous nos compatriotes, restais un inconnu, sur lequel couraient les bruits les plus fantaisistes.
Après avoir mis le ministre au courant des relations d'amitié que depuis seize ans j'entretenais avec Sa Majesté, je m'efforçai de montrer celles-ci sous son vrai jour, un jour qui, vraisemblablement, lui était étranger.
Je m'efforçai de montrer que le chef d'Etat était doublé d'un chef de famille soucieux de parfaire l'éducation de ses enfants et je continuais en affirmant que, sans avoir eu la possibilité de recueillir Sa pensée, j'étais convaincu que son seul désir était de résider en France, loin de la politique et fermement décidé à refuser toutes les propositions qui pourraient lui parvenir de fuir le territoire français.
A la suite de ces démarches, le feu vert me fut donné. M.J Gimont me faisait parvenir la copie du télégramme que le ministre des Affaires étrangères adressait le 26 septembre à son collègue, M. le ministre de l'Intérieur : « Je vous serais reconnaissant de bien vouloir transmettre le message suivant, chiffré, à M. le Préfet de la Corse : J'ai l'honneur de vous faire savoir que j'ai autorisé le Dr Dubois-Roquebert, chirurgien et ami personnel de l'ex-Sultan du Maroc, à rendre visite à celui-ci, à Zonza, dans la journée du 1er octobre. Le Dr Dubois-Roquebert se présentera à vous dès son arrivée à Ajaccio, le 30 septembre. Il pourra s'entretenir, seul à seul, avec l'ex-Sultan à qui vous voudrez bien faire annoncer sa visite la veille. »
Le 30 septembre, je prenais donc l'avion pour Ajaccio et, me conformant aux instructions de la dépêche ministérielle, je me rendis à la préfecture pour y rendre visite à M. Savreux qui en était alors titulaire.
C'est à la préfecture de Corse que furent, on le sait, hébergés le Souverain et sa famille à leur arrivée. Ils devaient y séjourner dix-sept jours avant d'être dirigés vers Zonza.
L'accueil que me réserva le Préfet fut très cordial, je lui exposai la question marocaine telle que nous la concevions, mes amis et moi.
Lui-même me dit la surprise qu'il avait éprouvée en découvrant dans ses murs un homme dont la personnalité était si différente de l'image qui lui avait été dépeinte et il me précisa la satisfaction qu'il avait éprouvée à mettre à la disposition du Royal Exilé les faibles moyens dont il disposait. A ma sortie de la préfecture, je louai une voiture qui, après avoir parcouru 94 kilomètres d'une route assez pénible toute en lacets, devait me permettre d'atteindre enfin Zonza, petite localité perchée à 684 mètres d'altitude. Les consignes me concernant ayant été transmises, je découvris l'hôtel du Mouflon d'Or, lequel abritait Sa Majesté. Cet hôtel annonçait sa présence par un panonceau assez minable qui promettait à sa clientèle un « confort moderne à des prix modérés ».
Ma prise de contact avec l'Auguste prisonnier fut particulièrement émouvante. J'étais, en effet, le premier Français ami qu'il voyait depuis son départ du Maroc. Certes, des sympathies bienveillantes s'étaient manifestées, mais Sa Majesté trouvait en ma personne, non seulement un ami, mais celui qui, pendant tant d'années, avait été le témoin de sa vie quotidienne et, parfois, le confident de ses peines. Que de choses donc n'avions-nous pas à nous dire ? Le Souverain s'enquit de ce qui s'était passé à Rabat à la suite du départ brutal qui lui avait été imposé.
De mon côté, j'étais curieux. Le décor était minable, la place mesurée : il s'agissait davantage d'un campement que d'une installation digne de ce nom. Des caisses étaient entassées, les unes au-dessus des autres, certaines suppléant éventuellement l'insuffisance de siège.
Seuls, les efforts déployés par l'équipe dévouée envoyée par l'hôtel Crillon conféraient un certain lustre et un certain confort. Cette équipe de serviteurs ne devait d'ailleurs pas prolonger son séjour au-delà du 15 octobre. Mais le cadre nous importait peu, tant nous étions heureux de nous retrouver. Nos curiosités ne se laissaient pas de se satisfaire et c'est longtemps après son début que la conversation s'engagea sur le terrain politique.
Sa Majesté et les Princes ne disposaient que des informations apportées par la presse. Sa Majesté pensait que son séjour à Zonza ne devait être que provisoire et qu'elle serait appelée à vivre en métropole dès qu'auraient été réglés les détails pratiques concernant le lieu et l'installation d'une résidence. La logique, le droit, les lois de l'hospitalité justifiaient une telle opinion.
Le Souverain fut donc surpris lorsque je lui appris que, personnellement, je ne partageais pas cet optimisme. Cette triste conclusion qui se voulait réaliste s'appuyait sur ce que j'avais pu constater, tant au Maroc qu'à Paris.


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