Le président de la CGEM, Hassan Chami, considère que sans la mise en oeuvre de certaines reformes prioritaires, l'économie nationale risque de ne plus décoller. Il estime que le mémorandum du patronat constitue une plate-forme pour le gouvernement afin de réaliser ce décollage. Aujourd'hui le Maroc : Au-delà des traditionnelles revendications du patronat, vos deux mémorandums critiquent la stratégie économique de l'Etat et proposent des solutions concrètes, cela ressemble à un programme politique ? Hassan Chami : Le premier mémorandum a été publié à la veille des élections législatives du 27 septembre. Son timing signifie qu'il était destiné aux partis qui allaient participer à ces élections pour qu'ils prennent positions sur les propositions que nous leur avons soumises. Nous avons par la suite découvert que ce mémorandum a été bien accueilli par la plupart des composantes politiques dont certains en ont fait état pendant leur campagne électorale. En définitive certains partis ont pris positions, mais ce mémorandum n'a fait l'objet d'aucun rejet. C'est ce qui nous a poussé à le traduire en mesures concrètes pour les proposer aux décideurs. Comment ont-il accueilli ce deuxième mémorandum ? Il a connu le même accueil que le premier aussi bien par le Premier ministre, par les membres concernés du gouvernement, les présidents des deux chambres ainsi que par les commissions parlementaires. D'ailleurs, l'opinion publique a remarqué que le contenu de ces propositions converge avec les idées du gouvernement et ce constat a été palpable dans la déclaration gouvernementale. Croyez vous que, dans l'état actuel de l'économie nationale, le gouvernement puisse répondre à vos doléances ? Si le gouvernement ne le fait pas, il faut dire adieu au développement économique. Mais, je suis optimiste car le Premier ministre est capable d'appliquer ces réformes. D'abord, parce qu'il connaît très bien la situation en tant qu'homme d'affaires et ensuite parce qu'il dispose d'une majorité qui lui permet de valider son programme. On n'est pas dans une logique consensuelle pour laisser des blocages économiques mais dans une logique d'applicabilité immédiate. Il suffit d'avoir de la volonté pour baliser la route aux réformes, que ce soit sur le plan social, économique ou juridique. Quelles sont les mesures que vous estimez prioritaires et urgentes ? Il me semble qu'il suffit de concrétiser quatre ou cinq mesures essentielles pour que le train de l'économie nationale soit remis sur les bons rails. D'abord il faut que les opérateurs économiques aient de la visibilité en matière de législation de travail notamment la réglementation de la grève et des indemnités de licenciement. Il faut aussi que le gouvernement supprime tous les monopoles pour favoriser la concurrence aussi bien dans la gestion portuaire et aéroportuaire que dans le transport aérien et maritime. L'investisseur a besoin aussi et surtout d'une justice prévisible qui constitue la meilleure garantie pour l'action entreprenariale. Quant au grand chantier de la réforme de l'administration, l'exemple édifiant de la douane démontre que rien n'est impossible dans ce domaine. Pensez que le Premier ministre, Driss Jettou, est capable de réaliser tous ces grands et complexes chantiers ? Il ne faut pas se leurrer, tout est question de volonté car on ne peut réformer quand tout est facile et c'est plutôt le contraire qui est vrai. Ceci étant, je suis persuadé que le Premier ministre qui maîtrise bien son sujet est animé d'un esprit de reforme inébranlable qui va le pousser à remuer les montagnes.