Un phénomène qui prend de l'ampleur dans nos écoles Les agressions contre le corps enseignant se multiplient. En l'espace de quelques jours, cinq cas ont été relevés dans différents établissements. Le premier a été enregistré à Ouarzazate. La vidéo de l'agression qui a très vite fait le tour des réseaux sociaux avait choqué les internautes. On y voit deux hommes se disputer dans une classe. Au bout de quelques minutes, le jeune élève s'en prend violemment à son professeur à qui il assène plusieurs coups. Il faudra plusieurs élèves pour finalement les séparer. L'agresseur, âgé de 17 ans, a été arrêté et placé en garde à vue, dans le pavillon des mineurs à la prison locale d'Ouarzazate, dans l'attente de son jugement. Ce dernier est accusé d'«atteinte à un fonctionnaire dans l'exercice de ses fonctions et violence physique à son encontre». Mardi, un autre élève âgé de seulement 15 ans, soupçonné de violences à l'encontre d'un enseignant lors de l'exercice de ses fonctions, a été auditionné par les services de police du district de Mehdia. Selon les premiers éléments de l'enquête, l'élève, qui poursuit ses études au lycée qualifiant «Al Kasbah», a violenté son enseignant après avoir été incapable de justifier son absence des cours. Le mis en cause sera déféré au parquet dès clôture de l'enquête préliminaire. A Rabat, la police a arrêté un élève de 18 ans du lycée Ibn Batouta soupçonné d'avoir agressé un enseignant. Le prévenu sera déféré devant la justice dès clôture de l'enquête préliminaire menée sous la supervision du parquet général près la Cour de première instance de Rabat. A Kénitra, la police a procédé mardi matin à l'arrestation d'un étudiant à l'Institut spécialisé de technologies appliquées (ISTA) pour son implication présumée dans une affaire d'agression physique contre un professeur du même établissement. Les données préliminaires de l'enquête ont révélé que le mis en cause, âgé de 18 ans, a infligé des coups au niveau de la bouche et du front à ce professeur, ce qui lui a causé un traumatisme et des contusions. Le prévenu a été placé en garde à vue à la disposition de l'enquête menée sous la supervision du parquet compétent, et ce afin de déterminer les tenants et les aboutissants de cet incident. Le dernier cas a été relevé à Sidi Bennour. La brigade de la police judiciaire du district provincial de Sidi Bennour a procédé, mardi, à l'arrestation d'un élève âgé de 20 ans pour son implication présumée dans une affaire de coups et blessures à l'arme blanche à l'encontre du directeur d'un établissement scolaire. Selon les données préliminaires de l'enquête, le mis en cause, un élève du lycée «30 Juillet» à Sidi Bennour, a agressé physiquement le directeur de l'établissement à l'aide d'un objet tranchant (tournevis), après avoir refusé d'obéir aux orientations du cadre pédagogique, lui causant des blessures nécessitant un arrêt temporaire de travail de 20 jours. L'agresseur a été placé en garde à vue pour les besoins de l'enquête. Ces agressions à l'encontre de professeurs font redouter une recrudescence de la violence dans les établissements scolaires. La faute à qui ? Selon le sociologue Said Bennis, il s'agit d'un phénomène universel qui touche le monde entier. «La donne a changé. Auparavant, le professeur était vénéré. Ce qui n'est plus le cas. Les jeunes n'ont plus aucun respect pour leurs enseignants. Nous assistons à une véritable contagion de la violence qui s'explique par deux raisons, à savoir l'environnement éducatif et l'environnement social». L'école est le reflet de la société où la violence est présente partout : dans la rue, au sein de la famille (conflits entre parents), dans les médias mais aussi avec l'Internet. Pour lutter contre ce phénomène qui ne cesse de prendre de l'ampleur, le sociologue estime qu'il faut instituer une éducation aux valeurs dans la mesure où ce sont les valeurs qui déterminent, dans une large mesure, les normes, les attitudes et les conduites des individus, leur intérêt pour l'action éducative est primordial. «La génération présente n'a pas été bien encadrée. Il faut désormais penser aux générations futures», indique-t-il. Pour sa part, Jamal Chahdi, directeur du Centre des droits des gens (CDG), estime que «ce phénomène est le résultat de la violence qu'exercent les enseignants envers les élèves dès le primaire .Ainsi, l'enfant qui a été agressé au primaire peut devenir violent une fois adolescent. La haine de l'école et son désir de vengeance peuvent se diriger vers l'enseignant». M. Chahdi pointe également du doigt la formation pédagogique des enseignants. Celui-ci estime que la situation va empirer avec les enseignants contractuels qui n'ont pas assez d'expérience et qui sont dans l'incapacité de gérer des situations de conflits avec les élèves. Le directeur du CDG recommande de former les enseignants à une pédagogie de la non violence. Une grève nationale de deux jours Les syndicats les plus représentatifs dans le secteur de l'enseignement montent, quant à eux, au créneau. Pour protester contre les violences subies par les enseignants, ils ont annoncé une grève nationale les 8 et 9 novembre. Les trois fédérations relevant de l'Union marocaine du travail (UMT), de l'Union générale des travailleurs du Maroc (UGTM) et de l'Union national du travail au Maroc (UNTM) se sont mobilisées pour la «dignité» du corps enseignant.