Le jeune pianiste espagnol Javier Perianes se produit ce mardi à la salle Bahnini de Rabat. Considéré comme « l'avenir du piano » dans le monde hispanique, cet artiste n'en garde pas moins la tête froide et veut d'abord éprouver des sentiments avant de les traduire musicalement. Toute une théorie. Dans son pays, il est considéré comme l'avenir du piano. Les journaux espagnols ne tarissent pas d'éloges sur lui. Le chef d'orchestre Simon Battle lui a proposé de rejoindre le prestigieux Orchestre Philharmonique de Berlin. Le grand pianiste israélo-argentin, Daniel Barenboïm, le considère comme son disciple. C'est dire que Javier Perianes n'est pas tombé de la dernière pluie. Il peut montrer une longue liste d'hommages et de prix, en dépit de son jeune âge. Il peut également sortir des enregistrements réalisés pour la radio 2 classique, TVE et Canal Sur. Cette petite consécration ne fait pas perdre le Nord au pianiste. Il refuse d'avoir la grosse tête. Il rappelle dans ses entretiens ses origines humbles et le dur métier de son père qui était mineur. Né en 1978 à Huelva en Andalousie, Javier Perianes balaie d'un revers de main tous les mots hyperboliques dont le crédite la presse de son pays. Il rejette la pression que mettent sur ses épaules ceux qui le considèrent comme l'avenir du piano dans le monde hispanique. «Je ne corresponds pas à l'image qu'on se représente d'un pianiste. Je ne suis pas un romantique qui vit en dehors de son monde. J'aime regarder la télé, parler de foot, lire des magazines people et m'embraser pour ma fiancée !», dit-il. L'intéressé est déterminé à s'inscrire en faux contre l'excentricité des artistes de sa corporation. Lorsqu'on lui dit : «vous les pianistes, vous êtes très bizarres», il approuve en répondant : «oui, ILS sont très bizarres». Cette volonté de garder un pied ancré dans le monde réel ne signifie pas pour autant que Javier Perianes badine avec son art. Il est très ambitieux. En attestent les longues heures qu'il passe chaque jour devant son piano. Il a même établi une corrélation entre sa volonté de ne pas se détacher du monde et l'art qu'il exerce. «Pour bien jouer, il faut que je connaisse les sentiments que je communique à travers la musique. Je ne peux pas communiquer une déception si je n'ai pas été réellement déçu dans la vie. L'amour, la joie, le bonheur et la trahison, je veux les éprouver pour pouvoir les jouer d'une façon juste». Le public pourra juger du bien-fondé de cette théorie en écoutant les interprétations de Javier Perianes des partitions de Debussy, Beethoven, Blasco de Nebra, Mozart, Schubert et Chopin. Des compositeurs qui ont exprimé toute la gamme des sentiments que peut éprouver un homme en une vie.