Selon le premier rapport mondial sur la violence et la santé, publié début octobre 2002 par l'OMS, la violence fait plus de 1,6 million de morts chaque année. Il s'agit du premier rapport complet du genre à envisager la violence comme un problème de santé publique mondial. Au Xxème siècle, on estime que les conflits ont provoqué directement ou indirectement la mort de 191 millions de personnes, dont plus de la moitié sont des civils. Dans certains pays, des études ont montré que les dépenses de santé dues à la violence représentent jusqu'à 5 % du PIB. Pour les experts de la santé publique, ces statistiques ne représentent que la partie émergée de l'iceberg, car la majorité des actes de violence sont commis à l'abri des regards. L'objectif du rapport est justement de les faire sortir de l'ombre. La violence figure parmi les principales causes de décès dans la catégorie des 15 à 44 ans, étant à l'origine de 14 % de décès chez les hommes et de 7 % chez les femmes. Au cours d'une journée moyenne, 1424 personnes sont victimes d'un homicide, ce qui fait presque un mort par minute. Une personne se suicide toutes les 40 secondes environ et les conflits armés font quelque 35 morts par heure. D'après le directeur général de l'OMS, Le Dr Gro Harlem Brundtland «Ce rapport nous interpelle à bien des égards. Il nous force à aller au-delà de notre conception de ce qui est acceptable et confortable, pour remettre en question l'idée selon laquelle les actes de violence sont simplement des questions qui relèvent de la vie privée, du choix individuel ou d'aspects inévitables de la vie quotidienne. Or la violence est un problème complexe, lié à des formes de pensée et de comportements façonnés par une multiplicité de forces à l'intérieur de nos familles et de nos communautés, des forces qui peuvent transcender aussi les frontières nationales ». Les données sur la violence des jeunes montrent que les taux d'homicide chez ceux-ci ont augmenté dans de nombreuses parties du monde. Pour chaque jeune tué suite à un acte de violence, on estime que 20 à 40 autres sont blessés et ont besoin de soins. L'enquête montre que les disputes et l'intimidation physique sont monnaie courante chez les jeunes, et que l'alcool est un des facteurs qui précipitent la violence. En ce qui concerne la maltraitance des enfants, les données de certains pays semblent indiquer qu'environ 20 % des femmes et 5 à 10 % des hommes ont été victimes de sévices sexuels pendant l'enfance. Les femmes, indique le rapport, sont souvent exposées aux risques les plus importants à domicile et dans des lieux qu'elles connaissent bien. Près de la moitié des femmes victimes d'un homicide sont tuées par leur mari ou leur compagnon ou par un ex-partenaire. Dans certains pays, la proportion peut même aller jusqu'à 70 %. Certes, il est difficile de donner des chiffres exacts en raison de la notification fragmentaire, mais les données disponibles semblent indiquer que près d'une femme sur quatre serait victime d'un acte de violence sexuelle de la part de son partenaire pendant sa vie. La plupart des victimes d'une agression physique subissent des actes de violence à répétition pendant une période prolongée. Entre un tiers et la moitié des cas, les brutalités sont accompagnées de sévices sexuels. Pis encore, dans certains pays près d'un tiers des adolescentes font état d'une initiation sexuelle sous la contrainte. La maltraitance des personnes âgées constitue en outre l'un des aspects les plus cachés de la violence. Jusqu'à 6 % des personnes âgées disent avoir été maltraitées. Comme le souligne le Dr Etienne Krug, directeur du Département de la prévention des traumatismes et de la violence, « La violence n'a rien d'inéluctable et elle ne fait pas davantage partie intégrante de la condition humaine. Les données qui nous parviennent du monde entier font penser que la violence peut être évitée par différentes mesures axées sur l'individu, la famille et la communauté. ». Il est donc possible d'intervenir, en comprenant mieux ces situations et ces causes. Car si les résultats des récents travaux de recherche indiquent que les facteurs biologiques et individuels peuvent expliquer en partie la prédisposition à l'agression, on assiste plus souvent à une interaction de ces facteurs avec des facteurs familiaux, communautaires, culturels etc, qui aboutit à une situation propice à la violence. Parmi les recommandations dans le rapport, figurent des actions préventives primaires, comme les programmes préscolaires et de développement social destinés aux enfants et aux adolescents, le renforcement des mesures en faveur des victimes de la violence, la promotion du respect des traités internationaux et de la loi, et l'amélioration de la collecte des données sur la violence.