Al Adl Wal Ihssane est la Jamaâ qui tient à rester en dehors du processus démocratique actuellement en cours d'édification dans notre pays. Pourquoi ? La position de la Jamaâ du cheikh Abdessalam Yassine est connue. Ce groupe n'a jamais senti une volonté réelle du changement, comme l'explique clairement Abdelwahed Moutawakkil, secrétaire général du cercle politique d'Al Adl Wal Ihssane. «S'il existait vraiment une volonté de changement, nous aurions perçu des signes annonciateurs. Or la seule chose que l'on constate est un effritement de la scène politique, tandis que la réalité reste toujours la même que lors de l'ère précédente» note-t-il. Et d'ajouter «Il ne s'agit pas simplement de déclarations dont nous en avons assez, la transition se fait avec des actes concrets. Jusque-là, nous n'avons rien vu de crédible». en principe, ce genre de position implique une disposition d'une ou de plusieurs propositions alternatives. Ce qui n'est pas le cas avec les adeptes du cheikh Yassine. Selon M. Moutawakkil, la crise que connaît le Maroc est très profonde avec de multiples facettes, d'où la nécessité d'une approche globale de la situation politique actuelle. «Nous avons appelé à un pacte englobant tous les intervenants en vue d'instaurer une étape nouvelle. Nous ne prétendons pas avoir la solution à nous seuls, ou qui que ce soit d'autre d'ailleurs. Elle ne peut émaner que grâce au concours de toutes les forces vives du pays, et ce à travers une approche particulière; Sans cette dernière, aucun programme politique –s'il en existe- ne pourrait aboutir» argue-t-il. Une piètre consolation pour certains observateurs et une fuite en avant pour d'autres. Que faire alors ? Soumettre l'action politique à une rigueur géométrique? Considérer qu'un pacte politique constituerait indéniablement un aboutissement logique, même si cette logique semble illogique ? D'où sortirait cette idée mirifique qui aboutirait vers un miracle ? Dans ce genre d'histoire, on sait rarement à temps la bonne réponse. Toujours est-il que le point de vue de la Jamaâ est de moins en moins convaincant. Les prémices de l'opposition à ce point de vue commençaient à se faire sentir pour s'arrêter quelque temps après la mort de feu Mohamed Bachiri, un ex-membre de la Jamaâ devenu un farouche opposant des thèses yassiniennes. Il y a juste quelques années, le destin de la Jamaâ aurait pu prendre une autre tournure. Sous la surface tranquille de la «Mechiakha »triomphante, grouillait en réalité tout un réseau d'opposition. Mohamed Bachiri n'était pas le seul à contester la dominance sans limites du cheikh Yassine. D ‘autant plus que la disparition de ce dernier risque de semer la pagaille dans les rangs d'Al Adl Wal Ihssane. Aucun des dauphins du vieux cheikh ne dispose de son charisme acquis après des années de sorties rocambolesques dues à des actes individuels (publications, lettres, prison, résidence sous surveillance, appel à la non-violence etc). La position de la Jamaâ -considérée passive par les observateurs - semble ne pas prendre compte des aspirations du peuple marocain qui réclame la démocratie à cor et à cri. A moins que ces islamistes refusniks adoptent l'adage qui préconise que les combats importants se font rarement sur le champ de bataille.