Afghanistan. Dans la nuit de dimanche à lundi, 40 convives d'un mariage ont été tués lors d'un bombardement américain dans le sud de l'Afghanistan. Une nouvelle «erreur» qui attise les critiques quant aux méthodes du Pentagone. Il aura fallu tout un remue-ménage médiatique pour que la dernière bavure américaine sur le sol afghan éclate au grand jour. Mardi, le Pentagone lui-même a dû rendre compte de ce qui s'est passé durant cette fameuse nuit de dimanche à lundi. Des appareils américains, dont un bombardier B-52, ont largué sept bombes de 900 kilos sur des cibles au sol dans la province de l'Uruzgan, au sud. Et au moins 40 civils afghans étaient en train de célébrer un mariage dans le village de Kakrakai, district de Dehrawad, ont alors été tués. Le commandement central de Tampa (Floride) a précisé que ses avions «avaient frappé plusieurs cibles au sol, y compris des sites d'artillerie anti-aérienne qui tiraient sur eux». De l'avis même du commandant Jeff Davis, porte-parole du département de la défense, une des bombes «au moins ne s'est pas dirigée là où elle devait aller»… «Nous ne savons pas où elle est tombée», a-t-il ajouté. Et de conclure que ces obus «avaient peut-être provoqué des morts». En attendant les résultats de la mission d'enquête afghan-américaine dépêchée sur place mardi, plusieurs témoins, dont des responsables locaux, ont pour leur part rapporté le drame vécu par les convives d'un mariage qui se déroulait dans le village de Kakrakai. Entre 2 et 4 heures du matin, au beau milieu des noces, au moins 40 personnes ont donc été tuées «par erreur». «Je ne sais pas ce qui s'est passé dans ce village si ce n‘est que des gens tiraient sur les forces de la coalition avec des mitrailleuses à gros calibre», a déclaré mardi le colonel Roger King. «Nous croyons savoir qu'il y a eu des victimes civiles durant l'opération», a-t-il poursuivi depuis la base utilisée par ses troupes à Bagram, au nord de Kaboul. Riposte US à des attaques au sol ? Dans ce cas, il faudrait prouver que les Afghans avaient apporté leurs mitrailleuses lourdes aux noces. Et qu'ils les ont utilisées contre les hélicoptères américains. D'autant que cette bourgade semble ne pas être la seule touchée par des raids cette nuit-là. «Plus de villages ont été bombardés, et aussi pendant la journée de lundi», a même affirmé Raz Mohammad, le frère du gouverneur de la province de l'Uruzgan Yar Mohammad, craignant qu'il y ait «plus de victimes». Ce n'est pas non plus la première fois que les forces américaines, au nom de leur guerre contre les Taliban et les membres du réseau Al-Qaïda, dérapent de la sorte. Ces bavures ont même entraîné la mort de quelque 3.700 Afghans depuis le lancement de l'opération en octobre 2001, selon des sources humanitaires et universitaires. En avril dernier, un avion américain avait aussi bombardé par erreur des soldats canadiens près de Kandahar (sud), et tué quatre d'entre eux. En janvier, ils avaient tué 16 soldats afghans alliés dans le centre du pays, alors qu'ils visaient des installations de Taliban. En octobre, au moins 10 civils avaient été tués dans un quartier résidentiel de Kaboul, alors que la cible était un hélicoptère de l'aéroport. Ces dérapages s'avèrent tellement nombreux que certains responsables britanniques, cités dimanche par le Sunday Telegraph, estiment aujourd'hui que les méthodes américaines sont inefficaces et «contre-productives ». Il est en tout cas évident qu'en tuant des civils, par quelque maladresse que ce soit, les forces américaines auront de plus en plus de mal à exiger la coopération de la population afghane dans leur traque de «terroristes ». Et ce, même si la Maison-blanche s'empresse à chaque bavure de «présenter ses condoléances aux familles» des victimes.