Depuis le 12 août dernier, les transporteurs de sables et de matériaux de construction sont en grève. Un mouvement suffisamment suivi pour affecter négativement le secteur du BTP, une profession qui traîne déjà des insuffisances de toutes sortes. Au Maroc, le secteur du bâtiment et des travaux publics (BTP) souffre autant d'un déficit d'image que de carences diverses. Parmi celles-ci, le transport de sable et autres matériaux de construction, demeure rongé par différents maux : vétusté du parc, proliférations du fret informel, mal formation des conducteurs… Etc. Autant de donnes qui trouvent leurs raisons d'être dans l'obsolescence, des textes législatifs, voire un vide en la matière. Aussi, les pouvoirs publics tentent de plus en plus d'y remédier, car il y va de l'image des entreprises marocaines de BTP, mais aussi de la sécurité sur nos routes. Certes, il y a eu la signature, le 28 juin dernier, d'un contrat-programme entre le gouvernement et la Fédération Nationale du Bâtiment et des Travaux Publics (FNBTP). Mais les textes y figurant ne concernent que des aspects institutionnels, financiers et réglementaires, avec lesquels le gouvernement s'engage à aider l'entreprise marocaine de BTP pour être plus compétitive. Sauf que, la mise à niveau de ce secteur passe aussi par une stratégie adaptée en matière de transport des matériaux. D'abord, lutter contre l'informel, sachant qu'une grande part des 80.000 camions s'adonnant à cette pratique, opèrent dans l'approvisionnement des granulés. Plus particulièrement, et depuis longtemps déjà, bon nombre de plages marocaines se vident régulièrement de leur sable par ces pilleurs sans scrupule. Car, il faut savoir que le sable utilisé dans la construction de tout type de bâtiment est essentiellement marin, à l'inverse de celui employé dans la construction de route et autoroute et qui, lui, provient des carrières. Avec l'augmentation croissante des chantiers, qu'il s'agisse de bâtiment, de route ou de port, le besoin en sable se fera de plus en plus ressentir. Consciente de la gravité de la situation, la FNBTP a tiré la sonnette d'urgence, tout en appelant à une action efficace pour l'étude du problème et la mise en place d'une solution. Un cri d'alarme qui n'est pas resté sans réponse, puisque les autorités gouvernementales veillent actuellement à stopper ces mouvements de pillage. D'où une grève des transporteurs de sable, suivie principalement dans l'axe Casablanca-Kenitra et entrant dans sa deuxième semaine (puisque entamée depuis le 12 août). Un mouvement de dérayage qui trouve aussi son fondement dans les revendications des grévistes, à savoir le relèvement du seuil du tonnage (de 38 à 50 tonnes) et la révision des sanctions (dont la saisie du véhicule) conséquentes aux infractions relatives au tachygraphe (ou mouchard). Une colère qui n'est pas sans incidence sur ce secteur d'activité, puisque bon nombres des grévistes sont des transporteurs de sociétés privées de BTP. Et celles-ci justement, dont la création est en moyenne, relativement récente (70 % d'entre-elles ont moins de 15 ans) sont de taille modeste (seules 67 sur 2 800 entreprises réalisent un chiffre d'affaires supérieur à 50 millions de DH) et se caractérisent par une très grande précarité. Un coup dur pour cette profession, dont les entreprises nationales de BTP devraient revoir profondément les modes d'organisation et de gestion. Car, mieux organisées et plus adaptées au secteur, elles pourraient alors soumissionner pour les grands marchés d'infrastructures, au même titre que les entreprises étrangères.