Après les Britanniques, c'est au tour des médiateurs russes de tenter d'apaiser les tensions entre les deux voisins asiatiques qui œuvrent eux-mêmes en ce sens pour convaincre les grands de ce monde. Le chef de la diplomatie britannique Jack Straw, envoyé dans le sous-continent asiatique depuis mardi, a rencontré mercredi le ministre indien de l'Intérieur, Lal Krishna Advani, après avoir vu le président pakistanais la veille. Si à l'issue de son premier entretien, il a déclaré que Pervez Musharraf était «sincère» dans ses efforts de lutte antiterroriste, le diplomate européen a certainement eu du mal à convaincre New Delhi. L'Inde a d'ailleurs déjà fait savoir que depuis le 11 septembre, le général pakistanais avait «eu tout le temps qu'il voulait» (pour faire ses preuves). Le ministre indien des Affaires étrangères Jaswant Singh a ajouté qu'il était «vital» que le président pakistanais «se rende compte de l'urgence de la situation», alors que l'Inde n'a pas exclu l'option militaire pour mettre fin aux infiltrations de combattants islamistes au Cachemire. Anticipant sur la réaction indienne, le président pakistanais a d'ailleurs dès ce mercredi décidé d'envoyer cinq émissaires à l'étranger pour expliquer la position de son pays sur la crise. Ces derniers doivent partir en fin de semaine pour les Etats-Unis, la Russie et plusieurs pays musulmans et transmettre un message selon lequel le Pakistan ne souhaite par la guerre et est prêt à la recherche d'une solution par le dialogue à la crise avec l'Inde. L'ex-président Farooq Ahmed Leghari a ainsi été choisi pour partir en mission en Russie et en Allemagne, de même que l'ex-ambassadeur en Inde, Ashraf Jehangir Qazi, expulsé le 18 mai par New Delhi. Après avoir entamé une guerre psychologique axée sur la menace militaire -voire nucléaire- et les démonstrations de force, les deux voisins ont donc à présent opté pour une offensive diplomatique. Leur objectif commun est de prendre la communauté internationale à témoin du manque d'efforts, même du double jeu mené par l'autre. Une nouvelle porte de sortie à cette énième crise leur est cependant offerte. Il s'agit de la conférence asiatique prévue du 3 au 5 juin à Almaty, au Kazakhstan, au cours de laquelle le Premier ministre Vajpayee et le président Musharraf ont accepté de rencontrer le président russe. Il s'agirait cependant de deux entretiens bilatéraux entre Vladimir Poutine et chacun des deux responsables, ce qui éviterait un face à face direct. Sur le terrain, les tensions au Cachemire sont toujours aussi fortes. Au moins cinq personnes ont été tuées et huit blessées par des tirs indiens, dans la nuit de mardi à mercredi, sur des villages pakistanais proches de la ligne de contrôle, selon Islamabad. Ces victimes portent à au moins 55 le nombre de morts annoncés depuis le 17 mai du côté pakistanais. Côté indien, le parti au pouvoir au Jammu-et-Cachemire a réclamé un plan d'autonomie à New Delhi. Le Parti de la conférence nationale a fait cette annonce alors que l'Inde a l'intention d'organiser des élections régionales avant la mi-octobre dans la partie du Cachemire sous son contrôle, et que cette région divisée en deux se retrouve à nouveau au cœur du conflit entre New Delhi et son voisin.