Ifrane. L'enquête réalisée par la délégation provinciale de l'habitat (DPH) sur le développement urbain de la ville d'Azrou est considérée par d'aucuns comme un véritable tableau de bord pouvant aider les décideurs à mieux piloter demain les stratégies en matière d'habitat. Les responsables de la DPH d'Ifrane en sont convaincus : en face des besoins urgents de l'habitat, il faudrait aussi savoir prendre du recul, d'engager des réflexions et de ne pas se contenter simplement de gérer le quotidien et de faire de l'activisme sans vision. Devant les échecs du passé, le secteur de l'habitat impose en effet la mise en place de fondations sûres et solides pour pouvoir maîtriser les enjeux et les besoins de l'habitat en devenir. Ce sont là, les raisons qui auraient poussé et motivé la réalisation, par la DPH, d'une enquête sur l'habitat et le développement urbain de la ville d'Azrou. Cette enquête est d'ailleurs la première du genre. A ce seul titre, elle constitue déjà un événement. La documentation rassemblée est considérable et pallie largement le manque flagrant des initiatives anticipatives et surtout, les silences des responsables sur la situation de l'habitat dans la province d'Ifrane. Après six mois d'enquête sur le terrain, les conclusions de la délégation de l'habitat sont révélatrices. On apprend ainsi que 67 % des ménages d'Azrou, environ 6800 ménages, vivent encore dans 19 quartiers non réglementaires. Mis à part des quartiers qui ont connu des interventions de restructuration, la majorité se trouve toujours sous-équipée : faible taux de branchement au réseau de l'eau potable et un réseau d'assainissement défectueux ou inexistant. Les quartiers Mcharmou, Azrou centre, Tizi … etc… illustrent la situation. Pis encore, cette enquête, révèle que de nombreuses familles, 94 ménages, courent encore un danger permanent en continuant à vivre sous des toits menaçant ruine, 1% du parc de logement. Inutile de rappeler ici le nombre grandissant des maisons effondrées ces dernières années notamment après chaque pluie. Ajouté à cela, les maisons sommaires et bidonvilles, 2% du total des logements, on comprend aisément la montée des inquiétudes du côté de la population concernée. Cette situation justifie aussi, selon de nombreux observateurs, l'échec de la politique de résorption de l'habitat insalubre initiée par l'ANHI au début des années 90. Devenu premier promoteur foncier d'Azrou, l'ANHI est aujourd'hui indexée d'avoir «caricaturé ses objectifs», pour avoir, explique un conseiller municipal, «affiché des prix très chers sur ses lots qui dépassent de loin le privé, ce qui enterre à jamais l'espoir des pauvres de posséder un logement décent». Conséquence : le risque grandissant de voir «de nouvelles poches embryonnaires de bidonvilles s'étendre» en raison, comme le dit sans ambages le rapport de l'enquête en question, de l'exode rural et de la cherté des lots équipés. Une autocritique qui mérite d'être soulignée. Riche et documentée, l'enquête ne s'est pas limitée au seul secteur de l'habitat, mais elle a essayé de dégager également les différentes facettes du développement urbain de la ville d'Azrou, ses contraintes et ses perspectives. Tout est passé au peigne fin des enquêteurs : économie locale, le parc de logement, la topographie, l'environnement et l'urbanisation ainsi que les recommandations pour parer aux besoins dont le tableau a été brossé d'une manière détaillée. Certes, selon des initiés, l'enquête pèche des fois par de nombreuses contradictions liées notamment aux critères suivis dans le choix de l'échantillonnage et à l'absence des autres partenaires dans l'élaboration des recommandations. Mais au-delà, ce travail de proximité offre au moins aux responsables locaux une riche mine de données dont l'exploitation pourrait sans doute constituer un point de départ pour une véritable stratégie locale dans le secteur de l'habitat. Notamment pour les villes tampon comme Azrou dont la ceinture de pauvreté menace son développement harmonieux.