Les chefs d'Etat et chefs de délégation de la Ligue arabe ont clôturé le sommet, entamé samedi à Tunis, au cours duquel ils ont adopté des résolutions axées sur les réformes dans les pays arabes. S.M. le Roi Mohammed VI a défendu dans son discours l'urgence du changement. Certains parlent déjà d'un tournant dans l'histoire de la Ligue arabe. Premier précédent historique : la position collective des dirigeants arabes relative à une «condamnation des opérations militaires contre les civils palestiniens et les dirigeants palestiniens, ainsi qu'une condamnation des opérations contre les civils sans discrimination», en référence aux Israéliens. Cette résolution a fait l'objet de vifs débats avant son adoption par les 22 membres de la Ligue arabe. La Syrie, l'Algérie et le Liban avaient appelé aux amendements du communiqué final en vue de modifier la référence la dénonciation des attentats contre les civils «sans distinction». Autre décision historique : l'adoption des réformes qui ont été à l'origine du report de la 16-ème session du sommet arabe ordinaire qui devait se tenir les 29 et 30 mars à Tunis. Les dirigeants arabes se sont engagés solennellement, pour la première fois, à entamer un processus de réformes «selon les principes de bonne gouvernance», à «approfondir les bases de la démocratie», à «élargir le champ de participation politique» et à «respecter les droits de l'Homme et la liberté d'expression en accord avec les conventions internationales». La veille de l'adoption de ce communiqué, SM le Roi Mohammed VI avait défendu dans un discours, prononcé devant les chefs d'Etat des pays arabes, le projet des réformes sur lesquelles avait buté le précédent sommet avorté. Avec des termes très clairs, il a exhorté les dirigeants arabes à «affirmer, par un dialogue constructif, que nous disposons de notre propre projet, un projet arabe réformiste et moderniste». Ce projet «reste tributaire des changements à apporter aux structures et mécanismes désuets de la Ligue des Etats arabes». Le Souverain a souligné l'urgence de ces réformes : «Nous insistons avec plus de force, aujourd'hui, sur l'impératif de modernisation des mécanismes et des structures de l'action arabe commune, et ce à l'instar des ensembles régionaux avancés, telle l'Union européenne qui fait de l'intégration économique le prélude et la voie d'accès à l'unité et à la complémentarité entre ses membres». Les pays qui réclament des réformes dans le monde arabe ont eu donc gain de cause de ceux qui ne semblaient pas disposés à le faire. Par ailleurs, tous les dirigeants arabes ne sont pas restés jusqu'à la fin des travaux du sommet marqué par le départ théâtral du dirigeant libyen Mouammar Kadhafi, qui a même appelé au retrait de son pays de la Ligue arabe. Le guide libyen s'est retiré lors du discours du secrétaire général de la Ligue, Amr Moussa. Durant la séance inaugurale, ce dernier avait critiqué ceux qui rejettent sur la Ligue tous les maux du monde arabe, en référence à M. Kadhafi. Le président algérien, Abdelaziz Bouteflika, a également quitté Tunis dans la nuit de samedi à dimanche pour regagner son pays, de même que le roi Abdallah II de Jordanie. Outre le départ précipité de ces dirigeants, le sommet de Tunis s'est caractérisé par quelques échanges tendus. A cet égard, l'Algérie a demandé une alternance au poste de secrétaire général de la Ligue. Amr Moussa n'y est vraisemblablement pas disposé, puisqu'il a dénoncé ceux qui veulent «démanteler la Ligue arabe». En dépit de ces philippiques, le sommet de Tunis restera dans les annales comme le premier du genre où les dirigeants arabes condamnent les attentats contre des civils israéliens et où ils s'engagent, pour la première fois, à des réformes démocratiques. Le projet du Grand Moyen-Orient, cher aux Etats-Unis, y est peut-être pour quelque chose. Le communiqué final prépare déjà le terrain à sa réalisation.