À partir d'un certain niveau de responsabilité, le poste devient uniforme. Les différences entre hommes et femmes passent au second plan, estime Latifa Echihabi, directeur de l'Agence nationale pour la promotion de PME . Par contre, à compétence égale, chance égale, plaide-t-elle. Entretien . ALM : Que représente pour vous la journée du 8 mars ? Latifa Echihabi : C'est assurément une bonne occasion d'attirer l'attention sur le combat des femmes au Maroc. Cependant, tenant compte de notre culture et de nos spécificités, une journée n'est pas suffisante. Il faut que cette mobilisation soit réelle mais toute l'année. Le chemin à parcourir est encore long. Le rythme l'est malheureusement aussi. Cependant, une journée pour que la discrimination change de tendance, au lieu d'être négative, elle devient positive, j'estime que c'est une bonne chose. Il faut donner à la femme plus d'espace pour s'exprimer. En votre qualité de directeur de l'Agence nationale pour la promotion de PME, comment vivez-vous votre condition de femme à la tête d'un établissement public? Vous savez, à partir d'un certain niveau de responsabilité, le poste devient uniforme. Les différences entre hommes et femmes passent au second plan. Toutefois, les a priori subsistent toujours. La femme est sensée, et doit d'ailleurs, fournir un effort supplémentaire. Elle doit plus convaincre. Par contre, le professionnalisme est la vraie différence. Personnellement, et je précise que c'est un témoignage personnel, j'estime que la femme n'a pas encore tous ses droits. Nous sommes une minorité à arriver à des postes de responsabilité, au sein de l'administration ou ailleurs. C'est souvent grâce à la volonté de certaines personnes qui croient à la compétence au féminin. Sans ces personnes, les chances ne sont pas égales. Malheureusement, la règle voudrait qu'à compétence égale, chance égale. Nous n'avons pas l'opportunité de réussir à niveau supérieur ou égal à l'homme. Toutefois, on assiste davantage à l'émergence d'initiatives de nature à mettre sur orbite les femmes. Le travail et les messages de SM le Roi est à saluer. À titre d'exemple, choisir une femme comme conseillère en est la parfaite illustration. Côté salaires, la différence est aussi notable. Heureusement, nous à l'administration nous avons la chance d'avoir des grilles de salaires uniformes. Quel est votre regard sur le privé? Les challenges en entreprises sont tous les mêmes. Qu'elle soit publique ou privée, l'entreprise actuellement exige un savoir-faire et des compétences identiques. Toutefois, la présence féminine est très faible dans les deux catégories. Les femmes que j'ai côtoyées font face aux problèmes spécifiques à leur champ d'activité mais en parallèle, à d'autres plus liées à leur condition féminine. Il est tout de même bon de noter que les femmes se sont dotées de structure propre. Ainsi, l'AFEM, qui est membre de notre conseil d'administration, fait un travail remarquable. Quelles sont, selon-vous, les contraintes, à surmonter pour que les chances de la femme soient égales à celles de l'homme? Le constat s'impose de lui-même, malheureusement, à l'échelle nationale. Combien de filles scolarisées arrivent en fin de parcours ? Elles sont moins nombreuses à pouvoir mener à bien un cursus universitaire. L'analphabétisme y sévi davantage. Là réside le challenge réel pour le pays en entier. Mais globalement, les changements au Maroc sont nombreux. De l'aveu international, les pas enregistrés dans notre pays prêtent à espérer. La volonté est bien réelle. Comme je vous l'ai dit précédemment, si la journée du 8 mars donne un coup de pouce à la condition féminine, c'est assurément une bonne chose, mais la femme marocaine a réellement besoin d'un soutien effectif toute l'année.