Les trente six demandes de prise de parole qui avaient été déclarées au début de la 5ème session du comité central dont les travaux se sont poursuivis tout au long de la journée du dimanche 18 juin à Rabat, ont suscité un si grand nombre de vocations que par moment on a réellement douté des chances de tenir les délais. Pourtant pour Abdelouahed Souhail, le président de session, comme pour Nabil Benabdallah, le secrétaire général et les autres membres du bureau politique qui ont tenu à ce que chacun dise son mot sur la réponse à apporter au référendum du 1er juillet, il n'était pas question d'écourter les débats internes et démocratiques, marque distinctive du PPS, pour aller plus vite en besogne. Cela prendra le temps qu'il faudra, mais il ne sera pas dit que les militants du PPS n'auront pas pris leur décision en conscience, dira Souhail. Ce n'est donc que trois heures après la limite fixée que tous les avis ont été entendus et que Nabil Benabdallah en a pu faire la synthèse qui introduit au vote. Revenant dans ce résumé sur l'importance du projet constitutionnel, le Secrétaire général en a rappelé la signification pour le Parti. C'est le couronnement d'une longue action revendicative aux cours de laquelle les militants du Parti ont porté contre vents et marées et aux pires moments de notre histoire récente les principes de démocratie, de séparation des pouvoirs, d'égalité des genres, de justice sociale, de bonne gouvernance, de responsabilisation et de reddition des comptes qui sont aujourd'hui consacrés par le projet. C'est l'une des raisons pour lesquelles le PPS dira oui lors du référendum du 1er juillet. L'autre étant que, contrairement à ce qu'avancent les maximalistes, on ne pouvait obtenir mieux dans les circonstances historiques actuelles. Ce qui sera proposé le 1er juillet, ce n'est pas une constitution propre au PPS, mais celle de toute une nation aux composantes sociales, culturelles et politiques multiples ; ce qui d'ailleurs fait sa force et sa richesse. Le bureau politique a invité à dire oui lors du référendum car le projet de Constitution proposé est le plus approprié pour l'étape, a-t-il laissé entendre avant d'inviter les membres du comité à réfléchir sur l'après- référendum. Il serait erroné de croire que la lutte est terminée, il y a encore de nombreux autres combats à mener, a-t-il dit. Les textes ne sont qu'un élément du problème, a-t-il affirmé, il reste à préparer les élites qui seront appelées à les ancrer dans la réalité des faits. Il reste aussi à mener les réformes politiques qui doivent nécessairement accompagner le projet et l'arrimer à la réalité du Maroc nouveau, à établir la transparence politique et la justice sociale, à instaurer l'égalité des chances, à éradiquer l'économie de rente, à favoriser la libre concurrence…en un mot, il reste de quoi remplir une vie de militant socialiste progressiste, a dit en substance Nabil Benabdallah. Les membres du Comité central ont approuvé à l'unanimité la position favorable du Parti à l'égard du projet de Constitution proposé par référendum le 1er juillet. Accueil favorable national et étranger au projet de constitution Le projet de la nouvelle constitution, dont les contours ont été annoncés vendredi par SM le Roi, a recueilli le soutien et les louanges de plusieurs acteurs et forces politiques, syndicales, associatives et académiques nationales et a bénéficié d'un grand écho favorable à l'échelle internationale. Les différentes forces nationales ont ainsi exprimé leur soutien à ce projet, qui sera soumis à référendum le 1er juillet, et ont estimé qu'il constitue un tournant décisif dans l'édification démocratique et un jalon essentiel sur la voie de la consolidation d'un Etat moderne garantissant la dignité de ses citoyens et la stabilité de ses institutions. Pour ces partis, syndicats, associations et instances académiques, le projet de constitution apporte une nouvelle configuration sur des bases solides de l'Etat de droit et des institutions, susceptibles de favoriser l'émergence d'un régime démocratique solide et équilibré et de doter le Royaume d'une nouvelle génération de droits qui lui permettent de relever les défis politiques, économiques et sociaux. Ce nouveau texte place le pays dans la perspective d'une monarchie parlementaire et jette les bases d'un Etat moderne, ouvrant la voie à des réformes politiques profondes, s'érigeant ainsi comme un saut qualitatif dans l'histoire moderne du Maroc. Des appels à la mobilisation générale ont été lancés par les forces nationales pour expliquer les nouvelles dispositions et les nouveaux acquis qu'elles comportent et qui visent à faire entrer le Maroc de plain-pied dans une nouvelle ère démocratique. Pour leur part, les citoyens marocains ont favorablement accueilli et soutenu cette nouvelle initiative de réforme constitutionnelles et sont sortis en masse dans plusieurs villes du royaume pour exprimer leur adhésion au projet de la nouvelle constitution et aux réformes proposées. Loin de rester en rade, la communauté marocaine à l'étranger a exprimé son soutien au projet, soutenant que les nouveaux amendements vont permettre au Maroc de rejoindre le club des pays démocratiques. A l'échelle internationale, l'annonce du projet de la nouvelle constitution a été vivement saluée dans différentes capitales, ainsi que par plusieurs journaux internationaux et prestigieux centres de recherche. Ainsi l'Union européenne a exprimé sa disposition à «soutenir les efforts du Maroc pour mettre en oeuvre ces réformes profondes», qualifiant la nouvelle constitution d' «étape importante qui signale un engagement clair pour la démocratie et le respect des droits humains». «Les amendements proposés concernent des éléments-clés de réforme et de modernisation, tels que la séparation des pouvoirs, le renforcement du rôle du gouvernement, l'indépendance du pouvoir judiciaire, la régionalisation et l'égalité des droits entre hommes et femmes», a affirmé l'UE. A Paris, le président français Nicolas Sarkozy a, dans un communiqué, salué les «avancées capitales», affirmant que la France «appuie pleinement cette démarche exemplaire». Le président Sarkozy a estimé que les réformes annoncées dans le discours royal de vendredi constitueront des «évolutions institutionnelles majeures». «Dans le prolongement des engagements pris et après une large consultation, le roi Mohammed VI propose aux Marocains d'adopter démocratiquement, par référendum, des réformes qui constitueront des avancées capitales tant en ce qui concerne les libertés publiques et les droits individuels que le renforcement de l'Etat de droit ou la prise en compte de la diversité culturelle du Maroc», a écrit M. Sarkozy. Le chef de l'Etat français avait félicité SM le Roi, dans un entretien téléphonique, pour le discours adressé vendredi soir à la nation et exprimé son soutien aux réformes constitutionnelles engagées par le Souverain en vue de parachever l'édification de l'Etat de droit et des institutions démocratique. Pour sa part, le Parti socialiste français a salué les réformes constitutionnelles annoncées par SM le Roi comme «une évolution de velours» et une «nouvelle avancée démocratique au Maghreb». «L'annonce faite par Mohammed VI d'un référendum pour approuver une nouvelle Constitution le 1er juillet prochain représente une nouvelle avancée démocratique au Maghreb qui en appelle d'autres», a affirmé le secrétaire national du parti à l'International, Jean-Christophe Cambadélis. Le Souverain a reçu samedi un appel téléphonique du Roi d'Espagne, SM Juan Carlos 1er, au cours duquel il a félicité le Souverain pour le discours adressé, vendredi soir, à la nation. «Le Maroc cueille les fruits d'un engagement fort en faveur de la consolidation des institutions démocratiques entamée de longue date», estime, pour sa part, le think-tank américain Foreign Policy Research Institute (FPRI) dans une analyse publiée, dimanche, sur son site électronique. Le même centre de recherche relève que «l'expérience marocaine en matière de réformes constitue un modèle pour les pays du monde arabe, en ce sens que le changement politique, aussi substantiel puisse-t-il être, intervient par le biais d'efforts provenant de manière simultanée du sommet et de la base de la société». La presse mondiale est également largement revenue à ces propositions d'amendement en y dédiant chroniques, analyses et éditoriaux mettant en relief le contenu du discours royal. Ils ont déclaré Ghizlane El Maamouri, membre du Bureau politique Eu égard au sujet débattu, cette 5ème session du Comité central est un moment de force et de fierté. Fierté parce que le projet de nouvelle Constitution est le fruit du long parcours militant des progressistes socialistes et aussi, moment de force tant nous sommes conscients de la responsabilité qui est la nôtre en cette étape historique de notre évolution politique et sociale. Sur ce qu'est cette nouvelle responsabilité, je dirai qu'elle est celle de favoriser l'émergence d'une élite nouvelle ; une avant-garde capable de mener avec diligence et compétence le projet de nouveau Maroc. Car ce projet qui sera soumis à référendum début juillet a placé la barre très haut et, en repositionnant les partis politiques au centre de la gestion publique, il les astreint à une action plus efficace et mieux élaborée. Il me semble que cela ne peut se faire sans une plus grande capacité d'écoute des attentes des masses. Ce qui m'amène à dire qu'il faut rajeunir les élites et donner plus de place aux femmes dans les centres de décision. Mon passé de militante socialiste progressiste m'a convaincu de ce que le PPS qui a toujours mené une politique de rajeunissement et fait place aux femmes ira encore de l'avant sur cette voie. Sbihi Abderrahmane, membre du Comité central Le Comité central débat actuellement de ce que moi j'appelle la 2ème révolution du Roi et du Peuple. Nous en sommes d'autant plus fier au PPS que cette 5ème session fait suite au 2ème congrès qui a consacré l'égalité des droits, la justice sociale et toutes ces attentes que nous retrouvons aujourd'hui dans le projet de nouvelle Constitution. Si nous en tirons un légitime sentiment de fierté, nous en concevons également la grande responsabilité de sensibiliser les masses aux enjeux de la nouvelle donne. Cela pour l'immédiat, dans un terme plus lointain, il faut, me semble t-il, avancer en terme d'émergence des élites capables de conduire ce nouveau projet. Quand nous parlons de réformes politiques, nous ne nous excluons pas du champ de cette action. Il faut donc des élites compétentes, politiquement mûres, intellectuellement aptes à révolutionner les pratiques politiques que véhiculent les nouveaux textes. Alors je dis qu'il faut plus de jeunes et plus de femmes au sein de notre parti même. Rabii Elouafoudi, membre du Comité central A l'image de l'étape que traverse notre pays, cette 5ème session du Comité central de notre Parti revêt une importance historique. Il s'agit de dire d'une seule voix notre appréciation du projet sociétal que porte le projet de nouvelle Constitution. Si en effet il consacre une approche participative qui n'était pas évidente dans le passé, il s'agit aujourd'hui de matérialiser ce principe dans la pratique. La tâche est immense et complexe puisqu'il faut réaliser dans l'immédiat quelques unes des attentes populaires et des mécanismes de bonne gouvernance les plus récurrents. Car ce projet dont la philosophie est tout à fait nouvelle dans le domaine de la gestion constitutionnelle ne prône rien moins que l'extension des champs des libertés, l'égalité des chances, la responsabilisation en matière de gestion des affaires publiques…Bref, une nouvelle architecture sociale et politique qui dote les partis, le nôtre en particulier, d'une immense responsabilité. C'est en fait de cette perspective que discute le Comité en débattant de l'attitude à adopter le 1er juillet. Il s'agit de prendre position en toute liberté, et également en toute connaissance de cause puisque aussi bien ce sont-là les tenants de la conviction et de l'adhésion. Si les débats sont francs, c'est parce que chacun a non seulement conscience de la gravité du moment, mais encore de l'immense tâche qu'il faut entreprendre une fois qu'on a franchi le pas. Cette tâche exige de nouveaux maîtres d'œuvre, une élite nouvelle faite de jeunes et de femmes plus proches des attentes qui se sont fait jour dans la société actuelle. Ce qui implique l'importance grandissante des seules aptitudes et du profil. Ce sont en effet ces qualités qui désignent à la gestion des nouvelles affaires territoriales et à l'exploitation des opportunités offertes par l'extension des champs de l'action politique. Ce que je dis là est également valable au niveau national, mais l‘intention est simplement de dire ce qui est nouveau. Il faut donc une nouvelle élite pour le Maroc nouveau. Notre force au PPS est d'avoir perçu cette nécessité avant tout le monde et de nous employer à la réaliser en donnant leur chance aux jeunes et aux femmes. Taieb Chkili, membre du Comité central Nous vivons un événement d'une importance capitale. Ce projet de Constitution qui fait débat à cette 5ème session du Comité central, c'est le couronnement de décennies de militantisme à prix fort. Il faut se féliciter de cet immense acquis démocratique qui garantit aussi bien les libertés individuelles que collectives, assure la dignité de la personne et établit l'égalité de genre : en un mot qui constitutionnalise les pertinentes propositions de l'Instance Equité et réconciliation. Oui, c'est un immense acquis que la séparation es pouvoirs, que l'autonomie de la Justice, la primauté de la loi, la responsabilisation de l'exécutif, la constitutionnalisation des instances de défense des droits…Mais des acquis qui appellent une implication de tous. Car après la conceptualisation, vient le stade de la réalisation. Et donc vient la question : comment faire ? A mon sens le chemin obligé vers l'objectif est de faire en sorte que le peuple s'intéresse à nouveau à la politique. Et c'est à ce niveau qu'émerge le rôle des partis. Leur encadrement est essentiel à la propagation de la culture politique sans laquelle il n'y a pas d'action efficiente contre la gabegie, l'économie de rente, en un mot contre les anciennes habitudes qui ont entravé notre marche vers le progrès durant de longues décennies. Pour moi, approuver le projet de nouvelle constitution c'est tourner cette page et se tourner vers un avenir plus serein. Un monde nouveau où la parole appartiendra à une élite nouvelle capable de gérer les affaires du Maroc des régions uni. Gjmoula Mint Abbi, membre du Bureau politique La tenue de cette 5ème session du Comité central de notre parti est la preuve que c'est une formation politique respectueuse de ses instances et de la règle démocratique. Personnellement je suis fière de cette caractéristique dont la vie politique nationale n'offre que de rares exemples. Vous avez constaté comme les débats ont été francs et même parfois rudes. C'est ce qui fait la force du PPS : la liberté d'expression dans un cadre démocratique qui favorise l'éclosion de la décision majoritaire. Une fois la décision votée, tous doivent s'y conformer. C'est que pour nous la démocratie est aussi pratique interne. Alors évidemment nous savons la reconnaître quand elle se présente. Et elle s'est présentée avec le projet de nouvelle Constitution dont nous débattons aujourd'hui. Lisez-le, lisez les articles 20, 21, 23… et osez me dire qu'ils ne constituent pas des acquis de première importance. Personnellement je ne conçois pas qu'on dise non à un tel projet. Vous me parlez de multiculturalité. Je vous dis que le projet a réalisé de significatives avancées quand il a reconnu la dimension plurielle de l'identité nationale. La constitutionnalisation de l'amazighe, la promotion des dialectes et des cultures du terroir, ce n'est pas seulement une richesse, c'est aussi un enrichissement. Recueillis par A.L