Selon Dr Bouazza Kherrati, président de l'Association marocaine de protection et d'orientation du consommateur (AMPOC), la présence des lobbys des fournisseurs réduit l'influence des associations de protection du consommateur, lesquelles sont considérées comme des ennemis et non des partenaires. Il ajoute que, outre l'arsenal juridique, il faut mettre une charte de protection du consommateur et agir pour le changement des mentalités. Al Bayane : L'on constate un foisonnement des associations de protection du consommateur mais leur influence est toujours faible réel. Pourquoi d'après vous ? D. Kherrati : Si l'intervention des associations de protection du consommateur est toujours faible sur le marché national, cela s'explique par trois raisons. Il s'agit, d'abord, d'un mouvement jeune qui a vu le jour à la fin de ce dernier siècle. Secundo, l'existence des forts lobbys des fournisseurs, qui défendent leurs intérêts et qui considèrent ce genre d'associations comme des ennemis alors qu'il s'agit de partenaires, justifie le fait que l'action des associations reste encore limitée. De même, la disparité des organisations de défense des droits des consommateurs fait que leur influence est toujours minime. Elles n'ont pas encore acquis la même force que les associations qui existent dans d'autres pays notamment l'Europe. Est-ce que la législation marocaine en la matière octroie aux associations de protection du consommateur le pouvoir d'accomplir leur devoir ? C'est pour cela que j'ai parlé tout à l'heure de présence de lobbys qui agissent pour maintenir les associations de protection du consommateur sans moindre importance et qui sont même à l'origine du retard de la mise en place de la loi. Il ne faut pas oublier que la première mouture remonte à plusieurs années. Il a fallu 11 ans pour qu'elle soit entérinée. Et c'est grâce au discours royal d'Août 2008 qui a appelé à l'adoption d'un code de protection du consommateur que la loi a vu le jour. La loi de 31-08, qui n'est pas encore promulguée quoiqu'elle ait été adoptée par les deux chambres du Parlement, pose des mesures draconiennes aux associations de protection des consommateurs. Ainsi, pour intenter des actions en justice, ces associations doivent être reconnues d'utilité publique. Pour cela, il faut avoir une autorisation d'une administration non définie à laquelle l'association serait assujettie. Est-ce que le cadre juridique actuel garantit une protection réelle du consommateur ? Le cadre juridique ne pose pas problème. Il y a tout un arsenal juridique au Maroc, en l'occurrence la loi sur la concurrence, celle sur la salubrité des produits de consommation, la loi sur la pharmacie, le texte relatif aux actes médicaux, celui sur l'eau et autres. Cependant, pour garantir une protection effective des consommateurs, l'ensemble de ces lois doit fournir une charte de protection du consommateur. Le texte existe mais le blocage se pose au niveau de l'application. En plus, cela doit être accompagné d'un changement des mentalités.