Le Forum Social Mondial (FSM) de 2011 est organisé dans un contexte mondial marqué par la crise profonde du système néolibéral, symbolisé surtout par l'effondrement du fondamentalisme de marché illustré par la crise financière internationale. Il s'agit d'une crise structurelle de la mondialisation capitaliste avec ses dimensions sociales (accroissement des inégalités, pauvreté, discriminations), géopolitique (extension des guerres et conflits, accès aux matières premières, émergence des nouvelles puissances mondiales), écologique (changement climatique, épuisement des ressources naturelles, désertification, biodiversité) et idéologique (idéologies sécuritaires, remise en cause des libertés et de la démocratie, de la culture, de la science, de la modernité). Cette crise systémique du capitalisme est le résultat à la fois des contradictions internes au système lui-même et des luttes des peuples et nations du Sud ainsi que des mouvements populaires dans les pays industrialisés. Aussi, tous les mythes fondateurs du capitalisme, tels que le « libre-marché », le « libre-échange », les marchés «auto-régulateurs », sont partout remis en cause, y compris dans les pays capitalistes. C'est dans ce contexte que le Forum Social Mondial se veut être un espace de débat démocratique d'idées, d'approfondissement de la réflexion, de formulation de propositions, d'échange en toute liberté d'expériences et d'articulation de mouvements sociaux, réseaux, ONGs et d'autres organisations de la société civile qui s'opposent à toute vision totalitaire et réductrice de l'économie, du développement et de l'histoire, et à l'usage de la violence comme moyen de contrôle social par l'Etat. Ils y opposent le respect des Droits de l'Homme, la véritable pratique démocratique, participative, par des relations égalitaires, solidaires et pacifiques entre les personnes, les races, les sexes et les peuples, condamnant toutes les formes de domination comme l'assujettissement d'un être humain par un autre. Depuis le premier FSM de Porto Alegre en 2001, une certitude qu'”un autre monde est possible” est née. Le Forum est devenu depuis un processus permanent de recherche et d'élaboration d'alternatives visant à faire prévaloir, comme nouvelle étape de l'histoire du monde, une mondialisation solidaire qui respecte les droits universels de l'homme, ceux de tous les citoyens et citoyennes de toutes les nations, l'environnement, et soutient les systèmes et institutions internationaux démocratiques qui sont au service de la justice sociale et de l'égalité. Aujourd'hui, les analyses portées par le mouvement altermondialiste en particulier, sont acceptées et reconnues et contribuent à la crise de l'idéologie néolibérale. Les propositions issues des mouvements sont acceptées comme base de référence ; par exemple, le contrôle du secteur bancaire et financier, la suppression des paradis fiscaux et judiciaires, les taxes internationales, le concept de sécurité alimentaire, considérées il n'y a pas si longtemps comme des hérésies, sont à l'ordre du jour du G8 et du G20. L'orientation stratégique des mouvements sociaux œuvrant dans le cadre du FSM, s'organise autour de l'accès aux droits pour tous, de l'égalité des droits et de l'impératif démocratique. Les mouvements sont porteurs d'un nouveau mouvement historique d'émancipation qui prolonge et renouvelle les mouvements précédents. C'est autour de la définition des droits, de leur mise en œuvre et de leur garantie que se définit une nouvelle période d'émancipation possible. Au-delà des droits spécifiés dans la Déclaration universelle et précisés par le Protocole additionnel adoptés par l'Assemblée générale des Nations Unies en 2000, comme le droit au développement et le droit à la démocratie, les droits économiques, sociaux et culturels, une nouvelle génération de droits est en gestation ; elle correspond à l'expression de la dimension planétaire et aux droits qui se définissent dans la recherche d'un autre monde par rapport à la mondialisation dominante ; les droits environnementaux dans la perspective de la préservation de la planète ; les droits des migrants et des migrations qui interpellent la place des frontières et l'organisation de l'espace mondial. Au cours du Forum social mondial de Dakar, une question très présente est celle des débouchés politiques des mobilisations sociales et citoyennes. Elle concerne à la fois la question de l'expression politique des mouvements et des prolongements des mouvements par rapport aux institutions, à la scène politique et au gouvernement des Etats. Au niveau de l'ensemble des mouvements, la réflexion progresse sur l'importance de préciser, à travers l'invention d'une nouvelle culture politique, le rapport entre pouvoir et politique. Enfin durant ce FSM, l'accent sera mis sur la place de l'Afrique dans la situation mondiale et dans la crise. L'Afrique est un révélateur et un analyseur de la situation mondiale. L'Afrique n'est pas pauvre ; elle est appauvrie. L'Afrique n'est pas marginalisée ; elle est exploitée. Elle est indispensable à l'équilibre économique et écologique du monde par ses matières premières et ses ressources naturelles et humaines qui sont convoitées tant par les pays du Nord que par les pays émergents. Par ailleurs, l'Afrique risque de payer un lourd tribut à la crise actuelle du capitalisme. En effet, déjà affaiblis par les programmes d'ajustement structurel des années 1980 et 1990, les pays africains seront confrontés à de nouveaux défis de développement encore plus complexes. * Membre du Bureau politique du PPS et membre du Conseil de l'arrondissement Agdal et de la ville