Deux indices sèment l'incertitude en Espagne et risquent d'hypothéquer les espoirs de reprendre les taux de croissance de jadis: la chute de 1% de la consommation des foyers et la croissance nulle du Produit Intérieur Brut (PIB) au troisième trimestre. Cette conclusion est tirée de la lecture du dernier bulletin de conjoncture de la Banque Centrale de l'Espagne, publié vendredi. Elle rejoint en partie les résultats de l'Enquête sur la Population Active (EPA), rendus publiques le 29 octobre par l'Institut National de la Statistique (INE), selon lesquels le chômage affecte 4.574.700 personnes soit 19,79% de la population active. Le rapport de la Banque Centrale corrobore, en fait, les prévisions de certains experts financiers et économistes et révèle, qu'à l'exception du secteur des exportations dont le bon comportement a permis d'éviter de clore le troisième trimestre sur un indice négatif du PIB, la plupart des secteurs n'ont pas été épargnés par la récession. Le PIB d'Espagne a enregistré, de juillet à septembre derniers, un croissement nul bien qu'il eût augmenté de 0,2% en termes interannuels. Se basant sur les indicateurs macro-économiques et données sur l'évolution de l'activité des différents secteurs, la Banque Centrale estime que, durant le troisième trimestre de l'année en cours, « l'activité a subi un fléchissement » qui pourrait être « transitoire » à cause, particulièrement, de la fin d'exécution du Plan Espagnol pour la Promotion de l'Economie et de l'Emploi, dénommé Plan E. Il s'agit d'une sorte de programme d'entraide nationale dont le but est de donner une impulsion à l'activité économique par le biais de l'affectation de ressources publiques (prés de 2% du PIB) en vue de limiter les effets de la crise financière mondiale sur l'économie nationale et la chute du secteur du bâtiment. Il a été mis en marche, dés juin 2009, par le gouvernement central pour venir en aide aux autorités locales, régionales et municipales, afin de stimuler l'emploi par le financement de projets sociaux, l'appui des petites et moyennes entreprises et entreprises familiales, l'octroi d'avantages fiscaux et la modernisation de l'économie. La stagnation du PIB serait aussi motivée par les incidences de l'augmentation du Taux sur la Valeur Ajoutée (TVA) qui est passé de 16 à 18%, le 1 er juillet dernier, des impôts appliqués à certains produits de consommation à grande échelle, et la suppression des avantages fiscaux pour l'achat de véhicules neufs et équipement en électroménagers. A cause de ces deux facteurs, explique la Banque Centrale, le processus de récupération de l'activité économique s'est paralysé entre juillet et septembre au moment où l'activité au niveau mondial enregistre une progressive récupération. En comparaison avec le deuxième trimestre, les dépenses des foyers a baissé à cause précisément de la surpression de subventions de l'acquisition de certains biens de consommation et d'équipement. Il s'agit de l'achat de véhicules et de biens durables, les deux catégories les plus touchées par cette mesure. De même, la part de l'épargne privée a diminué de 16,2%. Il est fort probable que dans le futur immédiat, une légère « récupération » des dépenses des foyers espagnols puisse intervenir, compte tenu de la capacité d'épargne particulière. Néanmoins, de nombreux facteurs entrent en jeu et risquent de ralentir tout processus de récupération. La Banque Centrale cite particulièrement la fragilité du marché de l'emploi, la chute continue du marché immobilier, les nouvelles restrictions à la concession de prêts et les effets des mesures d'austérité dont souffre le secteur public et qui se répercutent sur le budget des foyers. Les dépenses des administrations publiques n'ont guère augmenté en comparaison avec la même période de l'exercice précédent puisque la rubrique consacrée aux biens d'équipement a chuté après quatre trimestres de croissance, un signe qui démontre que les mesures d'austérité appliquées par le gouvernement, depuis juin dernier, ont eu une forte incidence sur les dépenses publiques. Dans cet environnement marqué par un climat d'incertitude, le secteur du bâtiment ne peut en aucun cas surmonter la crise qui le secoue depuis 2007. De façon que les investissements dans la construction d'unités résidentielles ont baissé de 16,1%. Cependant, estime la Banque Centrale, le rythme des chutes dans ce secteur sera « moins prononcé » dans les prochains trimestres. Le tableau n'est pas entièrement noir. Un point positif est marqué par le bon comportement des exportations espagnoles entre juillet et septembre grâce surtout à la demande des pays émergents et la récupération des économies de la zone euro. Les secteurs de l'industrie et des énergies ont été également dynamiques et se situent au même niveau de croissance que celui du trimestre précédent. Le PIB paraît en fin de compte fortement conditionné par la chute du secteur du bâtiment et le ralentissement de celui des services qui dépend largement du comportement des dépenses des foyers. La réduction de 5% des salaires des fonctionnaires a eu une relation directe avec la modération salariale, une situation qui pourrait être corrigée grâce à l'amélioration des émoluments des salariés dans les négociations des conventions collectives à titre de 2011, et, l'application de la nouvelle réforme du marché du travail. Le gouvernement demeure, cependant, optimiste puisqu'il investit d'énormes espoirs en une future récupération qui pourrait se traduire par un taux de croissance moyen du PIB de 1,3% en 2011. Cette estimation a été avancée par le premier vice-président du gouvernement, M. Alfredo Perez Rubalcaba, vendredi, dans une conférence de presse à l'issue du conseil hebdomadaire des ministres, qui a commenté le rapport de la Banque Centrale d'Espagne.