Le Congrès des députés espagnol a ouvert, mercredi, l'année législative avec deux questions orales du Parti Populaire (PP : opposition conservatrice) à la séance de contrôle du gouvernement relatives aux relations entre le Maroc et l'Espagne et aux derniers épisodes de tension à la frontière de la ville de Melilla. L'année législative en Espagne a ainsi été inaugurée par un débat sur la question marocaine. Le PP, qui avait utilisé cet été des incidents de basse tension à Melilla dans l'intention de provoquer une crise avec le Maroc, s'en prend surtout au gouvernement socialiste pour avoir privilégié le dialogue et les usages diplomatiques pour la préservation des relations de bon voisinage avec le royaume. Deux ministres, celui des affaires extérieures, Miguel Angel Moratinos, et celui de l'Intérieur, Alfredo Pérez Rubalcaba, ont été interpellés pour informer la chambre basse des démarches entreprises auprès du Maroc pour la solution de ces incidents. Pourtant, M. Rubalcaba, qui a eu l'honneur d'être reçu le 23 août dernier en audience par le Roi Mohammed VI au palais royal de Casablanca, avait affirmé que la « page des incidents de Melilla avait été tournée ». Comme l'avait promis durant sa campagne contre le Maroc, les dernières semaines, il est bien évident que le PP a l'intention d'altérer le bon rythme pris par la coopération entre le Maroc et l'Espagne depuis le départ de José Aznar du pouvoir en mars 2004. Ceci fait partie de sa stratégie d'usure pour laquelle il cherche à épuiser le gouvernement socialiste avec la provocation de débats sur de faux problèmes sans se soucier des éventuels préjudices pour les rapports avec le pays voisin. Le face-à-face qui a eu, mercredi matin au parlement entre MM. Moratinos et Gustavo Aristegui, porte-parole du PP à la commission des affaires Extérieures, démontre à quel point le Maroc occupe une place de choix dans l'agenda politique espagnol. Le PP accuse le gouvernement socialiste de «vivre dans un monde virtuel» pour avoir «nié l'existence de crise avec notre voisin» (le Maroc). Pour Aristegui, qui a été décoré d'un wissam royal à l'ambassade du royaume en octobre 2008, «la défense du caractère espagnol de Sebta et Melilla» est «au centre de toutes les crises» de l'Espagne avec le Maroc. Pour cela, il a saisi l'occasion d'intervenir au Congrès des députés pour se diriger en ces termes au Maroc: «j'adresse un message clair à notre voisin: bien entendu nous nous portons bien, mais non pas à n'importe quel prix, en défendant les intérêts des espagnols». M. Moratinos qui a, qualifié de «vitales» les relations entre le Maroc et l'Espagne, a rétorqué que la défense des intérêts de l'Espagne «se fait par des relations fluides et excellentes avec le Maroc». Le gouvernement espagnol aspire à l'instauration d'une «politique intégrale» à l'égard du Maroc aux plans des échanges commerciaux, de sécurité, de lutte contre l'immigration irrégulière et le terrorisme y compris la solution du problème du Sahara et la recherche de meilleures relations possibles avec tous les pays du Maghreb. Le ministre de l'intérieur, M. Rubalcaba, a dû user d'un discours sarcastique pour répondre à un autre député du PP qui suggérait «une diplomatie préventive» à l'égard du Maroc. Le Parti Populaire «savait uniquement faire des guerres», allusion à la participation de l'Espagne dans la guerre d'Irak, en 2003, a rétorqué M. Rubalcaba. Le Maroc, qui fut matière à débat cet été durant deux longs mois dans les médias espagnols, ressurgit au parlement de l'Espagne comme sujet de confrontation entre les deux importantes forces politiques. A trois semaines de la grève générale annoncée par les centrales syndicales devant l'absence de solutions à apporter aux grands problèmes de la société, le PP a eu recours au système des questions «urgentes» pour introduire les relations avec le Maroc comme préoccupation nationale exigeant un traitement prioritaire par les parlementaires. Aucun mot n'a été soufflé par les deux parties au sujet des revendications marocaines de la souveraineté sur Sebta, Melilla et les îles Jaâfarines bien que celles-ci forment partie des problèmes en suspens entre les deux pays.