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Crise du Niger: Les tergiversations de la CEDEAO
Publié dans Albayane le 13 - 08 - 2023


Nabil El Bousaadi
Après l'éviction du président du Niger, Mohamed Bazoum, la Communauté Economique des Etats de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO) avait sommé les putschistes de rétablir, dans ses fonctions, l'ancien chef de l'Etat dans un délai d'une semaine ; faute de quoi elle aurait recours à la force militaire.
Cette menace n'ayant pas recueilli l'adhésion de l'ensemble des pays de la région et notamment celle de l'Algérie mais aussi celle du Mali et du Burkina-Faso où le pouvoir est détenu par des juntes militaires, la CEDEAO s'était trouvée contrainte de surseoir au lancement de toute opération militaire après l'écoulement du délai imparti.
Mis au-devant de la nécessité de «revoir leur copie», les dirigeants de l'organisation régionale avaient donc décidé de se retrouver, jeudi dernier, à Abuja, la capitale du Nigéria voisin.
Or, entre-temps et pour montrer leur détermination, les nouveaux maîtres du Niger qui avaient refusé, mardi, de recevoir, « pour des raisons de sécurité », une délégation comprenant des représentants de la CEDEAO, de l'Union Africaine et de l'ONU, ont annoncé la formation d'un nouveau gouvernement ayant à sa tête, une personnalité civile, à savoir, l'économiste Ali Mahaman Lamine Zeine et comprenant 20 ministres dont seuls ceux de la Défense et de l'Intérieur appartiennent au Conseil National pour la Sauvegarde de la Patrie (CNSP) qui a écarté Mohamed Bazoum.
Cette annonce, qui est venue confirmer la détermination des putschistes, est aussi un signe clair de défiance à l'égard des dirigeants de la CEDEAO.
Ainsi, bien qu'au cours de cette rencontre, la CEDEAO ait condamné «les conditions de détention» du président Bazoum», imputé la responsabilité de sa « sécurité » et de son «intégrité physique» tout comme celle «de sa famille et des membres de son gouvernement» à la junte au pouvoir au Niger, demandé le maintien de la fermeture des frontières et le gel des avoirs des personnes « dont les actions pourraient freiner les efforts de paix pour ramener un retour complet de l'ordre constitutionnel », ordonné «le déploiement de la force en attente», sollicité «le soutien de l'Union Africaine» et de l'ONU et chargé, enfin, son «comité de défense d'activer, immédiatement, la 'Standby Force' (Force en attente) pour rétablir l'ordre constitutionnel» au Niger, le président de la Commission de la CEDEAO, Omar Touray, a tenu à préciser, à l'issue de ce sommet, que toutes les options restent sur la table, y compris « une résolution pacifique» de cette crise.
Mais, pour que cette rencontre ne soit point assimilée à une gesticulation sans lendemain et à ce que d'aucuns désigneraient par «beaucoup de bruit pour rien», il a été convenu que les chefs d'Etat-Major des pays de la CEDEAO se réunissent samedi à Accra, la capitale du Ghana.
Il était prévu qu'à l'issue de cette rencontre, les chefs d'état-major allaient faire part aux dirigeants de l'instance régionale « des meilleures options » quant à leur décision d'activer et de déployer la «force en attente » même s'il est clair qu'en espérant encore parvenir à une résolution pacifique de la crise du Niger, la CEDEAO n'a fixé ni le calendrier, ni le nombre, ni même la provenance des soldats qui constitueront sa fameuse « force en attente». Mais, cette réunion qui n'a pas pu avoir lieu, pour des « raisons techniques », a été reportée sine-die.
Ainsi, bien que l'Algérie, le Mali et le Burkina-Faso aient condamné toute intervention militaire, la France a apporté «son soutien à l'ensemble des conclusions» du sommet de la CEDEAO puisqu'elle ne peut pas faire autrement du moment qu'elle est la première bénéficiaire des richesses minières du Niger et qu'elle va perdre ce privilège si les putschistes restent au pouvoir.
En marchant dans les pas de sa puissance tutélaire, le président ivoirien Alassane Ouattara a tenu à rappeler que les chefs d'Etat de la CEDEAO ont donné leur feu vert pour que l'opération « démarre dans les plus brefs délais » et annoncé que son pays est disposé à mettre sous les ordres du Nigéria, du Bénin et des pays qui les suivront, «un bataillon de 850 à 1.100 soldats».
Sachant, enfin, que les Etats-Unis et l'Union Européenne ont exprimé «leur inquiétude» quant à l'état de santé du président nigérien évincé, sans appuyer clairement cette intervention militaire que la plupart des Etats limitrophes veulent éviter, que va-t-il se passer, dans la région, dans les jours à venir ? Attendons pour voir...


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