Le parti social-démocrate du chancelier allemand Olaf Scholz a subi un cuisant revers dimanche lors d'une élection locale hautement symbolique à Berlin, son fief depuis plus de vingt ans, face aux conservateurs. Même si cette défaite s'est jouée surtout sur des enjeux locaux, elle intervient alors qu'au plan national Olaf Scholz est lui même sous pression, critiqué notamment pour ses atermoiements en vue de soutenir militairement l'Ukraine. L'Union chrétienne-démocrate conservatrice (CDU) de l'ex-chancelière Angela Merkel est arrivée en tête de l'élection pour le parlement local de la capitale allemande avec 28,2% des suffrages (+ 10 points), selon les projections des chaînes de télévision publiques diffusées en fin de soirée. Les résultats officiels devaient être publiés tôt lundi matin. Les sociaux-démocrates doivent se contenter de 18,4%, leur plus mauvais résultat depuis la fin de la Deuxième guerre mondiale. Pire même pour le SPD, il est au coude-à-coude avec les écologistes qui pourraient au final les reléguer en 3ème positon. La maire sortante de Berlin, Franziska Giffey, a parlé d'une « soirée amère » et d'une « situation difficile » pour son parti. Depuis 2001 (bien 2001), le SPD avait toujours terminé cette élection en tête. Le parti d'Olaf Scholz risque d'avoir du mal dans ces conditions à conserver le poste de maire de la ville-Etat de Berlin qu'il détient depuis plus de 20 ans. Il pourrait devoir se contenter d'une place de partenaire « junior » dans une coalition dirigée par les Verts, avec la gauche radicale, deux formations avec lesquelles les sociaux-démocrates dirigent aujourd'hui la ville, ou par les conservateurs. Lors du dernier scrutin au parlement local berlinois en 2021, le SPD était encore parvenu à l'emporter de justesse, avec 21,4%. Mais l'élection à l'époque avait été marquée par des dysfonctionnements d'organisation sans précédent, qui ont finalement conduit à son annulation et à une nouvelle élection, une première dans l'histoire des élections régionales allemandes depuis la Deuxième guerre mondiale. Le scrutin de dimanche s'est ainsi déroulé sous le regard attentif d'observateurs internationaux du Conseil de l'Europe, invités par la ville elle-même pour rétablir la confiance. Le parti social-démocrate semble avoir été pénalisé au plan local par les scènes de violence et chaos lors de la dernière nuit du Nouvel an à Berlin, lorsque pompiers et policiers ont été visés par des feux d'artifice dans certains quartiers à forte population immigrée. L'opposition conservatrice a accusé la majorité municipale de gauche de laxisme et lui a reproché d'avoir échoué dans sa politique d'intégration dans ces quartiers. Les résultats berlinois confirment aussi les tendances observées au plan national depuis de nombreux mois, à savoir une forte érosion du parti social-démocrate au pouvoir, une progression de l'opposition conservatrice et aussi de la formation d'extrême droite Alternative pour l'Allemagne (AfD). Ceci intervient dans un climat de forte inflation, de débat intense autour des livraisons d'armes à l'Ukraine et de craintes dans une partie de l'opinion liées à un nombre important de migrants dans le pays, notamment ukrainiens. Les négociations pour former une nouvelle coalition majoritaire dans la ville de Berlin s'annoncent très difficiles. Aucune des grandes formations ne s'est dit prête à gouverner avec les conservateurs, qui ont appelé dimanche soit « à un changement » à Berlin. Et l'extrême droite est hors jeu. L'élection berlinoise, sans remettre en cause la coalition nationale au pouvoir en Allemagne autour de M. Scholz, risque toutefois de fragiliser le chancelier. Berlin est en effet un Etat-région à part entière dans le système fédéral allemand et un changement de majorité dans la capitale pourrait avoir des répercussions sur une des deux chambres du parlement fédéral, le Bundesrat, représentant les 16 Länder.