Conjoncture mondiale et tensions sociales Par Fairouz El Mouden Les temps sont de plus en plus durs. Les projections de croissance revues à la baisse restent fortement tributaires à l'échelle mondiale des turbulences géopolitiques et des pressions inflationnistes et de la crise énergétiques. Pour le FMI, l'année 2023 sera celles des tensions sociales aggravées par les tensions économiques, d'ou les risques de ralentissement de la croissance et de pertes d'emploi. Le tableau est qualifié de sombre, à la veille du début du forum de Davos prévu en Suisse du 16 au 20 courant. Les tensions inflationnistes s'avèrent lourdes de conséquence pour la conjoncture mondiale actuelle. Le ralentissement de la croissance mondiale est de plus en plus alarmant, interpellent la directrice générale du FMI et le rapport du Forum Mondial Davos. A peine entamée, l'année en cours affiche des sérieux signaux de turbulence à commencer par l'aggravation des risques de l'inflation et la hausse du coût de la vie, les guerres commerciales, les troubles sociaux et la guerre Ukraine-Russie ou encore la guerre nucléaire. Ce n'est pas tout, l'on s'inquiète aussi et surtout du niveau de risques des niveaux d'endettement, du réchauffement climatique et du déclin du développement humain. L'année 2023 commence ainsi mal, voire très mal. La directrice du FMI alerte sur la cadence des conflits sociaux et des mouvements de grève. La croissance mondiale ralentit fortement face à l'inflation élevée, à la hausse des taux d'intérêt, à la réduction des investissements et aux perturbations causées par la guerre entre la Russie et l'Ukraine, annonce le dernier rapport du FMI. « Nous ne sommes que le 12 janvier et avons déjà (des illustrations) au Brésil, au Pérou, en Bolivie, en Colombie, au Royaume-Uni, tous pour des raisons différentes mais avec des tensions sociales très nettes », a expliqué Kristalina Georgieva, DG du Fonds monétaire international qui prédit de nouvelles tensions supplémentaires. Néanmoins, rappelle-t-elle, si le marché de l'emploi à fait montre de résilience ces dernières années grâce à l'intervention des gouvernements, la marge devient de plus en plus serrée puisque l'impact du resserrement financier aura sans aucun doute son impact sur l'emploi et donc le chômage. L'impact de la hausse des taux sur les pays endettés sera également dramatique, étant donné le risque de voir environ 60% des pays émergents et en développement basculer dans une crise de la dette souveraine. A cela s'ajoute les difficultés probables liées au risque de la dévaluation dans les différents pays. Le FMI veut malgré tout rester positif et dire « qu'une récession mondiale peut être évitée », même si un certain nombre de pays devraient voir un recul de leur PIB au cas où la Chine ne remettait pas en cause son changement de politique vis-à-vis de la pandémie, alors qu'une reprise économique dans le pays à partir du milieu de l'année « pourrait être le facteur le plus important de croissance mondiale pour 2023 », estime Georgieva. Pour elle, la résilience de l'économie américaine permet d'éviter un plongeon au niveau mondial. Quant au rapport 2023 du forum mondial Davos, il rappelle les effets néfastes et séquelles du Covid-2019 et la guerre en Ukraine qui ont flambé l'inflation et affaibli la croissance et l'investissement. « Les gouvernements et les banques centrales pourraient faire face à des pressions inflationnistes tenaces au cours des deux prochaines années, compte tenu du potentiel d'une guerre prolongée en Ukraine, des goulots d'étranglement persistants dus à la pandémie et de la guerre économique qui favorise des perturbations de la chaîne d'approvisionnement», note le rapport. Les risques sont ainsi liés à la probabilité des chocs de liquidité, à la poursuite du ralentissement économique et à la pression de l'endettement, lit-on de ce rapport. La poursuite de l'inflation tirée par l'offre s'avère désastreuse et la fin de l'ère des taux d'intérêt bas aura des implications désastreuses. Du coup, les états et populations fragiles subiront plus les effets d'entrainement en augmentant la pauvreté, la faim, les manifestations violentes et l'instabilité politique. Aussi, « les gouvernements continueront d'être confrontés à un dangereux exercice d'équilibre entre la protection d'un large segment de leurs citoyens contre une crise du coût de la vie et le remboursement des coûts de service de la dette »… Croissance au Maroc La Banque Mondiale table sur une croissance de 3,5% en 2023 et 3,7% en 2024 Le Maroc devrait connaître une croissance de 3,5% cette année et 3,7% en 2024, selon les projections de la Banque mondiale publiées dans sa dernière mise à jour des perspectives de l'économie mondiale. «Au Maroc, la croissance devrait s'accélérer pour atteindre 3,5% en 2023 (soit un taux inférieur aux projections précédentes) et 3,7% en 2024, le secteur agricole se remettant progressivement de la sécheresse de l'année dernière », indique l'institution financière internationale basée à Washington. Dans sa mise à jour des perspectives économiques du Maroc, la Banque mondiale relève également que «les dépenses publiques devraient compenser en partie la faiblesse de la consommation des ménages causées par une inflation élevée». Au niveau la région Moyen-Orient et de l'Afrique du Nord (MENA), la croissance devrait ralentir à 3,5% en 2023 et à 2,7% en 2024. Cette baisse est principalement due à «l'essoufflement du rebond» dans les pays exportateurs nets de pétrole, où la croissance devrait tomber à 3,3 et 2,3% en 2023 et 2024, respectivement, contre 6,1% en 2022. Dans son analyse, la Banque mondiale souligne que « la région reste marquée par des conditions économiques et des trajectoires de croissance très divergentes, des niveaux élevés de pauvreté et de chômage dans de nombreux pays, une faible progression de la productivité du travail, des vulnérabilités élevées et des contextes politiques et sociaux fragiles ». Et d'ajouter que «la hausse de l'inflation et le resserrement des conditions financières ont pesé sur l'économie des importateurs nets de pétrole». En glissement annuel, la hausse des prix à la consommation a atteint l'an dernier des taux à deux chiffres dans de nombreux pays qui ont subi une dépréciation importante de leur taux de change et une forte augmentation du prix des denrées alimentaires et de l'énergie. Selon la Banque mondiale, « les perspectives de croissance pour la région restent exposées à des risques de dégradation ».Globalement, l'institution financière internationale a prévenu contre un ralentissement «brutal et durable» pour les pays en développement, abaissant ses prévisions pour la croissance mondiale en 2023 à 1,7% contre 3% attendu il y a six mois.