La régionalisation de l'appareil de production dans un espace euro-méditerranéen et africain est une opportunité pour le Maroc et un bon compromis pour parer aux effets négatifs de la globalisation, a souligné, mardi, Mohamed Bachiri, Vice-Président de la Confédération générale des entreprises du Maroc (CGEM). «La régionalisation dans un espace Euro-Méditerranéen et Africain est une opportunité pour le Maroc, en termes d'accroissement et de diversification de la demande, d'intégration des filières de production et de développement de capacités d'innovation notamment dans les secteurs de l'énergie renouvelable et de l'industrie 4.0», a-t-il expliqué lors d'un workshop virtuel sur «le repositionnement du Maroc dans les chaînes de valeur industrielles post Covid-19» organisé par la Banque Européenne de Reconstruction et de Développement (BERD), la CGEM et la Bourse de Casablanca. La crise sanitaire liée au Covid-19 a révélé la vulnérabilité d'une mondialisation fondée sur le recours par les grandes puissances industrielles à des sous-traitants ou des structures concentrées, a-t-il fait observer, notant que cette crise a également montré des ruptures d'approvisionnement dans de nombreux secteurs tels que l'agroalimentaire, le pharmaceutique, l'automobile ou le textile. «Dans le cas du Maroc, il est primordial d'accompagner les acteurs à se reconvertir vers les nouveaux métiers mondiaux et de travailler dans un esprit de complémentarité et de production avec l'Europe, notre principal partenaire», a-t-il poursuivi, estimant que la production mondiale sera relocalisée à proximité en adoptant une logique de réduction des coûts, de maîtrise de la chaîne logistique et de la qualité des intrants, pour garantir la souveraineté dans les secteurs stratégiques. «Néanmoins, la relocalisation ne fera pas disparaître la concurrence internationale, ni le besoin de produits stratégiques que nous ne produisons pas dans notre pays, basé sur les avantages comparatifs de chaque nation mais nous allons apprendre à produire localement et faire confiance à notre système productif», a-t-il lancé. Pour sa part, Abdou Diop du cabinet Mazars, a indiqué que la crise sanitaire a révélé les risques géostratégiques qui découlent des chaines de valeur mondiales, sous leur forme actuelle, comme en témoignent la rupture des chaines d'approvisionnement de grands donneurs d'ordre mondiaux entraînée par une grande dépendance vis-à-vis de l'Asie. Cette situation a provoqué un regain de protectionnisme à l'échelle internationale où plusieurs pays ont imposé des restrictions sur l'importation de produits essentiels dans un contexte de crise, ainsi que l'apparition de nouveaux paradigmes géostratégiques sur les chaines de valeur industrielles, a-t-il rappelé. Il s'agit d'une réflexion stratégique atour du ré-engineering des chaines d'approvisionnement des acteurs mondiaux qui intègrent non seulement les impératifs de réduction des coûts mais aussi les questions de sécurité, a-t-il expliqué, faisant état également, d'une prise de conscience générale de l'importance de la souveraineté industrielle. «C'est dans ces paradigmes que le Maroc dispose de nombreux atouts» pour mettre à profit cette reconfiguration des chaines de valeur, à l'instar de sa position géostratégique au carrefour des continents, ses écosystèmes industriels préexistants et une position privilégiée sur les chaines de valeur mondiales actuelles, a-t-il fait valoir, mettant en avant les connexions logistiques établies par le Maroc au fil des dernières années et son maillage continental en Afrique. Pour réussir son repositionnement, le Maroc, selon M. Diop, doit faire preuve de veille et pro-activité dans la perspective d'avoir une offre adaptée et attractive, investir dans la recherche et développement, assurer un accompagnement institutionnel du tissu économique et exploiter les leviers des écosystèmes nationaux et régionaux. Le directeur régional Corporate de la BERD, Adil Chikhi, a quant à lui estimé que le repositionnement dans les chaines de valeur mondiales ne bénéficiera pleinement qu'aux pays qui investissent dans la recherche et développement et qui sont compétitifs sur le plan logistique, relevant la nécessité d'investir davantage dans la R&D au niveau national dans des secteurs tels que les technologies d'information. Le Covid-19 a engendré une crise sanitaire et humanitaire mais aussi productive au sens de l'arrêt de parties entières de l'activité économique, en particulier celle de la production mondialement organisée, a-t-il dit, rappelant que ce mode a été conçu uniquement pour optimiser les coûts et les flux associés. Cette rencontre s'inscrit dans le cadre de l'initiative «Back to Business» lancée par la BERD, ainsi que dans le cadre des actions de la CGEM et de la Bourse de Casablanca pour accompagner et soutenir les entreprises marocaines dans la gestion de la crise et de l'après-crise induite par la pandémie du covid-19. Ce workshop de lancement propose ainsi d'analyser la place du Maroc dans les chaînes de valeur en cours de reconfiguration et de traiter les évolutions passées et à venir des chaînes de valeur mondiales. Construite sous forme de 9 workshops, l'initiative "Back to Business" ayant pour objectif de fournir aux entreprises marocaines impactées par la crise des solutions concrètes, opérationnelles et directement applicables sur le terrain, apportera des éclairages sur, à la fois des problématiques transverses à plusieurs industries (les chaînes de valeur, l'export, l'économie circulaire, l'entrepreneuriat inclusif, le conseil...), et sur des problématiques sectorielles plus spécifiques (agro-industrie, logistique, plasturgie, tourisme,...).