Répondant à l'appel du mouvement «Defendamos la paz» (Défendons la paix), c'est par milliers que, dans toutes les villes du pays, les colombiens sont descendus dans la rue ce vendredi 26 juillet pour exprimer leur solidarité avec l'ensemble des victimes tombées depuis la signature, en Novembre 2016, du traité de paix avec les anciennes Forces Armées Révolutionnaires de Colombie (F.A.R.C.); à savoir, 137 anciens guérilleros et 627 civils selon l'Institut d'Etudes pour la Paix et le Développement (Indepaz). «Tout pour la paix, rien pour la guerre», «Nous sommes l'espoir et ils nous tuent» scandaient les manifestants arrivés à la tombée de la nuit à la place Bolivar au centre de Bogota en brandissant les photos des civils assassinés ainsi qu'une très longue banderole blanche sur laquelle sont inscrits les noms de toutes les victimes civiles. Ces dernières sont, dans leur grande majorité, des défenseurs des droits humains, des syndicalistes, des responsables locaux ayant dénoncé la corruption des autorités ou encore des paysans qui réclament le lancement de la réforme agraire promise pour pouvoir récupérer leurs terres spoliées par les milices armées au service des grands propriétaires terriens, généralement des narcotrafiquants, ou pour contrecarrer l'implantation de grands projets miniers. Ces «leaders sociaux», rappelle Camilo Gonzalez, le directeur d'Indepaz «sont un rouage essentiel de la démocratie». «Nous sommes là pour exiger que cessent les assassinats ciblés et exprimer notre solidarité avec toutes les victimes de la violence» explique Laura Gil, une des fondatrices du mouvement. Luis Garzon, un manifestant vivant à Bogota dans le quartier populaire de Ciudad Bolivar, justifie sa présence dans la foule par le fait qu'en sa qualité de syndicaliste, il aurait reçu des menaces de mort à l'instar d'un grand nombre de ses camarades. D'ailleurs, au début du mois de Juillet, «La Defensoria del pueblo» (Défense du peuple), l'organisme public chargé de veiller au respect des droits humains, avait prévenu que 982 leaders sociaux engagés dans la défense des droits de leurs collectivités sont menacés de mort. Carlos Negret, membre de cet organisme, rappellera, de son côté, que «les gens de la ville ne connaissent pas la peur avec laquelle vivent les gens de la campagne» du moment que les régions rurales isolées restent les plus touchées par la violence post-conflit dont l'entière responsabilité revient, selon la religieuse Constanza Arango, à cet Etat qui «n'a pas pu ou pas voulu reprendre le contrôle de ces régions, longtemps dominées par la guérilla» et qui continue, sur ordre du président Ivan Duque, à tirer «à boulets rouge» sur le processus de paix jugé trop laxiste conclu avec la guérilla des FARC par le président Juan Manuel Santos. Qu'en sera-t-il donc de ce traité de paix alors même qu'il a mis fin à un conflit qui a duré plus de cinq décennies, permis le désarmement de près de 7.000 combattants et valu à son signataire le Prix Nobel de la Paix en 2016 ? Va-t-il voler en éclat au grand dam d'une population meurtrie par plus de cinquante années de violence? Attendons pour voir…