La guéguerre des chiffres sur les créations d'emplois industriels se poursuit entre le ministre de l'Industrie et le Haut-commissaire au plan. Ahmed Lahlimi a tenu, mercredi à Rabat, une conférence de presse pour défendre ses statistiques. Pour rappel, les chiffres du HCP ont été critiqués par Moulay Hafid Elalamya affirme que son secteur a créé 40.036 emplois nets en 2017, alors que le HCP annonce que l'industrie y compris l'artisanat n'en a créé que 7.000 postes. «Les travaux du HCP répondent aux normes internationales, notamment celles de la commission des statistiques des Nations-unies», une affirmation qui n'a cessé d'être exprimée par Lahlimi en guise de réponse aux reproches du ministre qui lui reproche de se baser sur des sondages, qui ne constituent pas une science exacte. Pour Lahlimi, «rien n'est plus crédible que ces normes du système de comptabilité nationale des Nations-Unies». Le patron du HCP enfonce le clou en soulignant que ces normes constituent la seule donnée sur laquelle se basent les organisations internationales pour évaluer la crédibilité des statistiques avancées par les pays. De plus, «les enquêtes auprès des ménages conduites par le HCP se doivent de revoir, régulièrement, leurs approches méthodologiques, leurs bases de sondage et échantillons ainsi que leurs dimensions thématiques». C'est le cas justement de l'enquête nationale sur l'emploi qui, à partir de 2017, adopte un nouvel échantillon élargi de 60.000 à 90.000 ménages, introduit de nouvelles thématiques dans son champ d'investigation et intègre les nouvelles nomenclatures d'activités, de professions et de diplômes élaborées par le HCP sur la base des classifications internationales et adaptées à la réalité nationale en concertation avec les différentes institutions concernées. En tout cas, Lahlimi s'en est remis au chef du gouvernement pour défendre son institution. Au cours de sa rencontre avec Saâd Eddine El Othmani, le haut-commissaire au plan a mis en garde contre tout arrêt de collaboration avec son établissement. «Si le HCP n'est plus alimenté par certaines données, les statistiques nationales et régionales en seront impactées», prévient-il. Au-delà de cette polémique, l'équipe du HCP a également présenté les principaux résultats de l'enquête nationale sur l'emploi. Entre 2016 et 2017, le volume de l'emploi est passé de 10.613.000 à 10.699.000 actifs occupés, ce qui correspond à une création nette de 86.000 postes, contre une perte nette de 37.000 postes une année auparavant. Par secteur d'activité, «l'agriculture, forêt et pêche» a créé 42.000emplois, tandis que les services, le BTP et l'industrie y compris artisanat ont respectivement généré 26.000, 11.000 et 7.000 postes d'emplois. La qualité des emplois laisse toutefois à désirer. Le HCP déplore une très faible qualification de la main d'œuvre. Sur les 10,6 millions d'actifs, 6,2 millions n'ont aucun diplôme, soit 58,6% du total. A peine 13,5% détiennent un diplôme de niveau supérieur. Pis, la précarité du travail n'est pas prête de disparaitre. Le HCP dénonce particulièrement la faible protection des salariés dont les deux tiers ne disposent pas de contrat formalisant leur relation avec leur employeur. Premier accusé : Le BTP avec 772.000 non déclarés, soit 90,6% de l'emploi total dans ce secteur. De même, 96,7% des actifs occupés (10.282.000 personnes) ne sont pas affiliés à une organisation syndicale ou professionnelle. Dans le même contexte, 77,5% ne bénéficient d'aucune couverture médicale au niveau national.