Ils étaient nombreux à venir partager les moments de plaisir et d'échange, à l'occasion de la journée mondiale de la poésie, mercredi 21 mars qui coïncide, en effet chaque année, avec cet événement traditionnel. L'initiative du lycée qualifiant princesse Lalla Mériem d'Agadir est d'autant plus louable qu'elle se tient modestement, mais symboliquement, dans l'enceinte de l'établissement et plus exactement le lieu convivial préféré des apprenants qui n'est autre que la bibliothèque scolaire, marquée particulièrement par la présence notoire du délégué préfectoral, Naji Choukri, fort incitateur à ce genre d'activités probantes. Ahmed Saïd, proviseur du lycée était aux anges, ce jour-là. Il y avait vraiment de quoi s'esclaffer, au regard de cette pléiade de poètes, de critiques, d'intellectuels, de chercheurs…qui ont pris d'assaut cet espace, joliment pavoisé pour la circonstance. « Le printemps, en ces jours de l'éclosion des fleurs, ne concerne pas uniquement la nature, mais caresse pareillement l'âme et les sens. Une fête pour exalter la poésie et ses fabuleuses vertus », jubilait Ahmed Saïd, lors de son mot inaugural, devant cette panoplie d'invités, déjà emmitouflée dans les enivrements de la magie poétique. En fait, l'assistance était doublement choyée, en présence de cette flopée éminente et surtout de l'une des figures emblématiques de la poésie marocaine, Driss El Meliani à qui on a dédié cette manifestation enchanteresse. « Vous savez, les poètes n'aiment pas qu'on les couvre d'éloges et ne sont jamais grands, même si on y croit fort, mais ils préfèrent évoluer dans la discrétion, tellement les propos perdent de leur effet s'ils se dissocient de la musicalité », confie-t-il, avec la même touche d'humilité raffinée qu'on lui sait. Puis, larguant les amarres des réminiscences chatoyantes, il égrenait les anecdotes de la vie, toutes aussi amusantes que poignantes, d'un érudit de l'art sensuel. « Tenez, je vais vous raconter un désagrément comme il y en a eu beaucoup durant mon parcours. Quand j'étais encore sur les bancs de l'école, le spectre de la poésie m'avait joué un de ces petits tours de déraison, puisque je ne me suis pas retenu de dire de vers amoureux dédiés à ma professeur d'anglais. Certes, c'était déplacé de ma part, mais c'était plus fort que moi. Cette maladresse m'a coûté, en effet, l'expulsion. Heureusement, j'étais compris par d'autres personnes qui se sont montrées beaucoup plus clémentes à mon égard. » Tel un bohémien au sourire large et à la mémoire ruisselante, le poète plainait sans répit dans les méandres sinueux de l'art et de la culture, tout en crucifiant les curricula scolaires en perpétuel tarissement en termes d'imagination et de fécondité. Et puis, tout d'un coup, le modérateur de cette séance exquise, Rachid Yahyaoui, grand idolâtre du poète encyclopédique, pinçait son vis-à-vis et le rappela à l'ordre. Que voulez-vous, les poètes sont comme cela, prolixes, mais hautement sincères, car c'est toujours le cœur qui prend le dessus. En fait, quand il s'agit de poésie, les paroles vétustes passent souvent au second plan, au profit de la sonorité subtile et palpitante. C'est ce que la célébration a prévu comme menu suivant, à travers un récital voluptueux interprété par le poète du jour, Driss El Meliani, mais d'autres aussi qui ont pour nom, Mohamed Amine, poète iraquien résident aux Pays Bas, Abdallah El Haoufi, Assia Al Hyani, Hassan Melhabi, Abdeslam Doukhane, Najia Aqqa, sur fond musical mélodieux. Les élèves ont eu droit également à des contributions non moins étincelantes, à l'issue d'une compétition poétique montée en leur honneur. Les organisateurs n'ont pas manqué enfin de rendre un vibrant hommage à Driss El Meliani, en lui cernant la bannière de mérite, sous les applaudissements nourris de l'audience euphorique. De par ce rassemblement des plus pimpants, le lycée organisateur aura accompli un coup de maître dans la symbiose réconciliatrice avec l'art fringant sous toutes ses formes et l'apprentissage usuel émancipant. Saluons vivement cette tentative fort réussie.