Pour ré-enchanter le monde, le Festival des musiques sacrées du Monde de Fès, qui semble avoir repris une courbe ascendante depuis le retour de l'anthropologue Faouzi Skali, a décidé de dédier sa 18ème édition (8-16 juin) à Omar Al Khyyam, auteur des célèbres Rubaïyat (quatrains), qui nous font tant rêvés. Dans l'une de ses Rubaïyat, ce poète, homme de science, philosophe et spirituel écrivait: “cette roue sous laquelle nous tournons est pareille à une lanterne magique. Le soleil est la lampe, le monde l'écran, nous sommes les images qui passent” Pour le directeur artistique du festival, Alain Weber, Omar Al Khyyam fait partie de ces poètes, chanteurs, musiciens, conteurs et danseurs qui ont toujours “éveillé la profondeur de notre spiritualité et célébré la joie festive qui sommeille en chacun de nous”. Au cours d'une conférence de presse donnée, mercredi à Rabat, le DG de la Fondation Esprit de Fès et du Festival Faouzi Skali a décliné le programme de cette manifestation, qui se propose d'enchanter et de réenchanter le monde pour lui permettre de faire face aux totalitarismes, à l'horreur économique, au fait accompli et à la “dictature financière dont on ressent quotidiennement les effets sans en comprendre véritablement les leviers”. Ce n'est pas une fatalité, cette mondialisation avec laquelle tout le monde tente de composer, a-t-il relevé, estimant nécessaire de relever le défi par le chant, la poésie, l'art, la musique, la culture et autres formes d'expression artistique. C'est dans cette perspective, qu'il a été décidé de rendre hommage à Omar Al Khyyam, créateur hors du commun, qui a inspiré tant de générations y compris la diva égyptienne Oum Kalthoum, dont la voix résonne encore dans les oreilles de ses mélomanes. Dans le cadre de cet hommage, le réalisateur français Tony Gatlif tentera de mettre en scène pour l'ouverture du festival les paroles d'Al-Khayyam et avec la participation d'artistes d'Asie centrale, du monde arabe et persan. Des artistes de diverses expressions et genres vont également se produire dans le cadre la programmation de ce Festival. Le l'illustre jazzman américain Archie Shepp proposera un spectacle aux racines du Blues et du Gospel. L'enchantement voulu à cette édition sera célébré également aux détours des ruelles de la médina pendant trois nuits successives par de nombreux artistes à travers des musiques tsiganes, cubaines, occitanes, des danses indiennes et un hommage sera rendu de même à Mahmoud Darwich dans une création de Rodolph Burger. L'artiste islandaise Björk est attendue pour présenter à Fès son nouveau spectacle d'hymne à l'espace et à la nature, Biophilia. Quant à Joan Baez, célèbre chanteuse populaire américaine, elle va se produire lors de la clôture de cette fête de la musique. La magie du verbe et le frémissement des notes continuera avec un concert, qui fait déjà parler de lui, des deux ténors de la chanson arabe Wadie El Safi et Lotfi Bouchnak. Ensuite, le festival emportera le public en Espagne, au Pakistan et en Inde, où poèmes, danses et chants se chargeront d'embaumer les soirées de Fès. Le Festival a en outre programmé une sorte de Davos pour permettre aux chercheurs et autres spécialistes de débattre au cours d'un forum initié sous le thème “une âme pour la mondialisation” des tenants et aboutissants des nouveautés politiques, économiques, idéologiques et sociales de l'humanité. Rien que “le Printemps arabe” a provoqué des mutations qui requièrent pour leur compréhension tant de débats et discussions mais surtout un nouveau paradigme qui dépasse les vieilles recettes stériles du monde ancien. Pour les organisateurs, il importe en fait de rechercher à travers cette édition les moyens les plus appropriés pour faire face à l'opacité de la matière et au rouleau compresseur de la mondialisation pour échapper à l'uniformisation des cultures et des arts de vivre.