Nabil Benabdallah au Forum de la Mer L'aventure fut belle, sincère, productive et essentielle. Pour toutes ces raisons et parce que la mobilisation pour la sauvegarde et la promotion de la Mer et du littoral est vitale, les organisateurs ne peuvent que continuer à travailler à la pérennité du Forum. Durant quatre jours, du 8 au 11 mai, la ville d'El Jadida a abrité la 1re édition du Forum de la mer. Parallèlement à cette manifestation d'envergure internationale, de nombreuses activités sportives (show nautique, rassemblement de voiliers, des plongées, ski nautique) et artistiques (expositions d'art, ateliers photo et diffusions de films autour de la mer) furent organisées dans les villes d'El Jadida et d'Azemmour. Ce qui a poussé Mehdi Alaoui Mdaghri, le fondateur de ce forum, à déclarer samedi soir, en reprenant Mark Twain, «nous ne savions pas que c'était impossible, alors nous l'avons fait ». La réussite, pour un début, a dépassé les espérances. Les chiffres sont éloquents. Plus de 2000 visiteurs, 80 intervenants, 6 ateliers et 3 plénières. Si le fondateur du Forum a choisi ces mots, c'est parce que tous les défis liés à la création d'un événement ont été relevés. Mission accomplie pour cette première édition qui a installé la légitimité et la pérennité du Forum de la Mer! Le Forum prend le large. Dès la plénière inaugurale, le bien-fondé du Forum de la Mer a été souligné avec passion par les officiels présents devant un large auditoire de scientifiques universitaires, océanographes, historiens, journalistes, étudiants ou encore de simples profanes passionnés par la mer. Pour André Azoulay, conseiller du Roi, «la Mer nous nourrit, fournit notre oxygène, équilibre le climat, permet la quasi-totalité des échanges commerciaux, inspire le poète et fait rêver les enfants. Le Forum poursuit ce rêve et lui donne réalité». Il a affirmé que le Maroc est un «acteur majeur» dans l'économie marine du futur. «C'est dans les océans que se dessinent, pour le 21e siècle, les nouvelles frontières de la croissance, de l'innovation et d'un développement durable réconcilié avec l'éthique et l'écologie» Le conseiller du Souverain a souligné, dans ce contexte, «la nécessité de refonder le rapport des hommes à la mer pour donner toutes ses chances à l'économie bleue de demain, basée sur le respect des écosystèmes et du droit international, garant de la protection des ressources et d'une régulation équitable et responsable de l'exploitation des richesses des grands fonds marins aujourd'hui en jachère». Une stratégie du littoral Pour Nabil Benabdallah, ministre de l'Habitat, de l'urbanisme et de la politique de la ville, la création d'un espace d'échanges et de discussions autour de la mer est une obligation. Pour lui, il faut «porter la problématique de la Mer au rang de priorité du pays». Il a annoncé, ainsi, la mise en place d'une stratégie nationale de gestion du littoral marocain avant fin 2014. Dans ce sens, il a annoncé, mercredi, lors de l'ouverture du Forum, la mise en place prochaine d'une stratégie nationale de gestion du littoral afin de protéger ce patrimoine naturel qui concentre une grande richesse écologique avant fin 2014. Il a affirmé, ensuite, que le littoral marocain subit une forte pression urbaine et l'adoption d'une démarche partenariale impliquant tous les acteurs aux niveaux national, régional et local afin de sauvegarder ce patrimoine environnemental et préserver son développement durable. Benabdallah a fait part des actions entreprises par son département afin de valoriser le littoral marocain, citant, à cet égard, la Charte nationale d'aménagement du territoire, les plans national et régional de l'aménagement du territoire, ainsi que l'élaboration de plusieurs études attribuant au littoral un rôle capital en matière de développement. Pour Youssef Amrani, ministre délégué aux Affaires étrangères, la question maritime a été, toujours, au cœur de la politique extérieure du Maroc, notamment dans les volets relatifs à la sécurité, l'espace territorial et l'accord de pêche signé avec l'UE. Il a rappelé, à cet effet, l'accord de pêche entre le Maroc et l'UE, qui reste l'un des dossiers les plus sensibles que gère la diplomatie marocaine. Il a aussi affirmé que «la nouvelle alliance atlantique entre les pays d'Afrique, dont le Maroc est aujourd'hui le fer de lance, constitue également une opportunité importante pour le Royaume pour développer ses relations Sud-Sud surtout dans le domaine de la sécurité maritime à travers la lutte contre la piraterie dans le Golfe de Guinée qui menace la paix et la stabilité dans la région. Il a ensuite confirmé que «le projet de l'Union pour la Méditerranée (UpM), auquel le Maroc a adhéré depuis son lancement, constitue aujourd'hui un nouvel espace d'échanges et de dialogues entre le Maroc et ses partenaires du Nord et du Sud de la Méditerranée pour raffermir ses relations extérieures. Car la diplomatie et la mer ont toujours fait bon ménage dans notre Royaume, et aujourd'hui plus que jamais, le Maroc doit mettre en valeur ces atouts dans la gestion de ses relations extérieures». Il a applaudi, ainsi, cet espace de dialogue et de concertation né à El Jadida. Mouâd Jamiî, gouverneur d'El Jadida, à qui revient le grand mérite de la tenue de ce forum à El Jadida et qui a apporté un soutien considérable aux organisateurs, a rappelé la légitimité naturelle d'El Jadida «qui respire la mer» dans le rôle de ville-hôte du Forum de la Mer. C'est pour cela qu'il a estimé qu'«il est évident que le forum de la mer devienne un rendez vous annuel d'El Jadida et un carrefour incontournable dans l'agenda des décideurs publics et privés». Ensuite, il a mis en exergue les atouts de la région, dont l'activité économique et sociale est centrée autour de la mer et qui ambitionne de bâtir un nouveau modèle de développement territorial durable et cela autour de trois piliers essentiels : le tourisme balnéaire, la pêche maritime à travers une meilleure valorisation des algues marines pour une captation plus importante de la valeur ajoutée au niveau local et enfin l'industrie avec l'accompagnement des projets du groupe OCP, notamment le développement du port de Jorf Lasfar et la zone industrielle attenante. Puis durant deux journées, se sont succédé des ateliers multi- thématiques autour de la Mer et du littoral où experts marocains et internationaux ont échangé idées et expériences respectives devant un public venu nombreux. Bien des enjeux liés à la mer et au littoral ont été discutés. Du quotidien difficile du pêcheur artisanal à la guerre de l'eau qui couve, en passant par l'aménagement du littoral et les enjeux des énergies marines, les interventions ont été riches, passionnées et passionnantes. Et parce que le Forum de la Mer a l'ambition de voir au-delà des mers, des solutions concrètes ont été proposées, souvent à travers des expériences réussies ici ou ailleurs. Les ateliers furent, aussi, des moments de découvertes et de voyages. Découvertes de solutions concrètes à notre portée comme la fabrication d'éoliennes à axe vertical proposées par le brillant directeur de Recherche au CNRS Malik Ghallab. Ou encore les habitations sous marines éco-conçues présentées par le célèbre et passionnant architecte Jacques Rougerie. Des voyages, avec les navigateurs, Florence Artaud et Titouan Lamazou, qui ont partagé leurs expériences et leurs projets. Les historiens Leila Maziane et Laurent Vidal, eux, nous ont emmenés encore plus loin, aux temps de Mazagan la portugaise et des corsaires de Salé. Parce que Demain, c'est eux, le Forum fut aussi celui des enfants. De centaines d'entre eux ont participé à des sorties en catamaran, à des tournois de beach-rugby et de beach-tennis, à des ateliers ludo-éducatifs et ont visionné des films sur les océans et la protection de l'environnement. Pour bon nombre d'entre eux, ce fut le premier contact avec la mer. La joie et les sourires des enfants durant ces quatre jours furent une des plus grandes récompenses des organisateurs après des mois de travail et d'efforts. La récompense, c'est aussi l'implication des intervenants qui ont tous quitté El Jadida avec la promesse de leur soutien pour les prochaines éditions. Parmi les propositions et les recommandations formulées à la fin de ce forum, on notera, en particulier, le contrôle assidu de la pêche pour sauvegarder nos ressources halieutiques, la création d'un musée maritime et d'un ministère de la Mer, l'installation des éoliennes en mer... En attendant la prochaine édition, un «Livre Bleu», synthèse des travaux et recommandations du Forum, sera publié et largement diffusé sous format électronique.