Respect de la dignité et «zéro discrimination» Une marche, ayant réuni des représentants de la société civile, des défenseurs des droits de l'Homme et de personnes vivant le VIH, a été organisée dimanche 1er décembre à Rabat, à l'occasion de la Journée mondiale de lutte contre le Sida, pour réclamer le respect de la dignité des malades et «zéro discrimination» à leur encontre. Le véritable drame de cette catégorie de malades réside dans le fait qu'ils sont la plupart du temps rejetés et victimes de discriminations et de stigmatisations, selon la présidente de l'Organisation panafricaine de lutte contre le SIDA (OPALS-Maroc), Dr. Nadia Bezad, qui a rappelé que les malades déclarés au Maroc sont pris en charge par le ministère de la Santé pour ce est qui est du diagnostic, suivi et traitement de la maladie. Dénoncer les discriminations faites aux malades du SIDA Cette marche s'est en effet fixé pour objectifs de dénoncer la stigmatisation et la discrimination dont sont victimes les malades de la part de la société et quelquefois même de la part de leurs proches. Pratiques qui prouvent que le Sida est toujours considéré dans la société comme sujet tabou, non seulement au Maroc mais également un peu partout, et qui vont jusqu'à empêcher dans certains cas des malades de révéler leur état de santé, même à leur conjoint. Selon Dr. Nadia Bezad, présidente d'OPALS, la sortie dans la rue, à l'occasion de la célébration de la Journée mondiale de lutte contre le SIDA, a été décidée pour réclamer à haute voix le respect de la dignité et des droits des personnes atteintes du VIH et condamner les discriminations dont elles sont victimes. Au Maroc, a-t-elle dit, les malades déclarés sont entièrement pris en charge, puisque le diagnostic et le traitement sont assurés par le ministère de la Santé. Toutefois, a-t-elle dit, les malades du SIDA sont souvent victimes de discrimination et de stigmatisation, et c'est pourquoi l'OPALS a choisi de faire de cette journée une occasion de réclamer le respect de cette catégorie de malades dont de nombreuses femmes et enfants, qui vivent en silence leurs drames. Cette marche est l'occasion d'attirer aussi l'attention de la société sur les dangers de la pandémie, a affirmé pour sa part un autre membre de l'organisation panafricaine, Tounsi Aziz, selon lequel le Maroc doit redoubler de vigilance et prendre des mesures complémentaires pour inverser la tendance en vue de faire reculer le nombre des nouvelles infections, comme ont réussi à le faire certains pays africains, où le nombre des nouvelles infections a diminué de 50 % . Lancée de la place de Bab El Had, la marche s'est poursuivie le long du boulevard Mohammed V, avec la participation d'acteurs associatifs, de médecins, d'enseignants, d'artistes, de sportifs et de jeunes qui brandissaient des pancartes et scandaient des slogans appelant au respect des droits et de la dignité des malades, et à la cessation des pratiques discriminatoires et de stigmatisation dont ils sont victimes. Sur certaines pancartes on pouvait notamment lire : «Que cesse la marginalisation des personnes porteuses du VIH», «Que faire maintenant que j'ai le SIDA ?», «Pour le respect des droits des personnes atteintes du SIDA», «Intensifier la lutte contre le SIDA», «Les personnes vivant avec le VIH ont besoin non seulement de médicaments mais aussi de leurs droits et dignité», «Prévenir plutôt que guérir», ou «Préservons notre avenir et luttons contre le Sida». Prévalence du VIH au Maroc Dans un communiqué rendu public à l'occasion de la Journée mondiale de lutte contre le Sida, le ministère de la Santé indique que la prévalence du VIH dans la population marocaine est stable depuis l'année 2000 et se maintient à un niveau faible de 0,11%. Selon les dernières estimations du Programme national de lutte contre le Sida, le nombre de personnes vivant avec le VIH est de 29.000. Selon ce département, 6824 cas de VIH/sida ont été déclarés entre 1986 et fin juin 2012, dont 4314 au stade Sida-maladie et 2508 porteurs asymptomatiques du VIH. Le communiqué signale par ailleurs que 80% des personnes vivant avec le VIH ne connaissent pas leur statut sérologique et que parmi les cas de VIH/sida notifiés, les adultes jeunes de 25 à 44 ans représentent 70%, le mode de transmission prédominant est hétérosexuel (84%) et la part des femmes est de 48%. Lancé officiellement par le ministère de la Santé en avril dernier, le Plan stratégique national (PSN) de lutte contre le sida 2012-2016 engage le Maroc dans la concrétisation de l'accès universel à des services de prévention du VIH, de traitement et d'appui aux personnes vivant avec le VIH. Parmi les principales réalisations du département de la Santé dans ce domaine, ajoute le communiqué, figurent le lancement du processus des plans stratégiques régionaux prenant en considération les spécificités locales des 16 régions du Royaume, l'élaboration d'une stratégie spécifique de protection et de prévention des enfants et adolescents, et l'élargissement de l'accès à des services de prévention de qualité, ciblant les populations les plus exposées aux risques et ce en partenariat avec les ONG. Il s'agit aussi de l'accès au programme de réduction des risques et au traitement de substitution par la Méthadone pour les usagers de drogues injectables (UDI), l'amélioration du recours au dépistage, particulièrement pour les femmes enceintes et les populations clés exposées aux risques dans 150 établissements de soins de santé de base, en plus des 52 centres d'ONG, le démarrage d'un processus d'accréditation des centres de dépistage et l'élaboration d'un plan national d'élimination de la transmission du VIH de la mère à l'enfant. Campagnes de dépistages Au cours du mois de juin dernier, rappelle-t-on, le ministère a organisé une campagne nationale de dépistage, laquelle a permis de tester plus de 76.000 personnes, dont 198 ont été dépistées VIH positives et adressées aux différents centres référents de prise en charge et amélioré l'accès aux soins à toute personne vivant avec le VIH. Actuellement, 13 centres référents universitaires, régionaux et provinciaux offrent des soins en matière de VIH et 4.957 malades sont sous traitement antirétroviral, dont 93% d'adultes et 7% d'enfants dans la perspective de créer de nouveaux centres référents, dont 4 en 2013, notamment à Béni Mellal, Laâyoune, Ouarzazate et Safi. A la suite de la réussite de la cette campagne, le ministère de la Santé annonce l'organisation, du 19 au 26 décembre, d'une campagne nationale de dépistage du VIH chez les femmes enceintes sous le thème «Pour une nouvelle génération sans sida». Cette campagne de dépistage, qui a pour objectif de contribuer à l'élimination de la transmission du VIH de la mère à l'enfant, concernera les différents établissements de soins de santé de base et certaines maternités hospitalières dans 8 régions du Royaume, indique un communiqué du ministère. «Objectif zéro : zéro nouvelle infection à VIH, zéro décès lié au sida, zéro discrimination» sera le thème de la Journée de cette année. «Zéro décès et zéro nouvelle infection» sont des objectifs réalistes, soutient Luiz Loures, directeur du Bureau exécutif de l'ONUSIDA, notant, toutefois, que l'objectif «le plus difficile à réaliser est zéro discrimination, sachant que le lieu de travail est l'espace le plus efficace pour protéger les droits humains des travailleurs et offrir un environnement sûr et accueillant pour les personnes vivant avec le VIH et affectées par ce virus». Selon les chiffres de l'ONU, plus de 30 millions de personnes en âge de travailler et qui vivent avec le VIH sont toujours confrontées à un niveau élevé de discrimination, qui entrave ou limite leur accès à l'emploi. A l'échelle mondiale, les jeunes représentent plus de 40% des nouvelles contaminations au VIH chaque année. «Nous devons tous ensemble, gouvernements, organisations de travailleurs et d'employeurs et les mandants de l'OIT (Organisation International du Travail) - et autres acteurs, réaffirmer notre engagement à protéger les droits humains des personnes vivant avec le VIH afin qu'elles puissent disposer d'un travail productif et vivre dans la dignité», estime, pour sa part, le Directeur général de l'OIT, Guy Ryder. La non-discrimination, un principe et un droit fondamental au travail, est un point de départ primordial pour parvenir à l'objectif zéro. «Ensemble, nous pouvons le faire», souligne, pour sa part, Margaret Chan, directrice générale de l'Organisation mondiale de la santé (OMS). Selon elle, si les pays veulent réaliser l'accès universel aux services liés au VIH, ils doivent commencer par veiller à ce que tous les professionnels de la santé aient accès à une prévention, à un traitement et à des soins efficaces et abordables au plan financier.