Le feuilleton Vahid Halilhodžić semble, à bien des points de vue, incarner le bout des beaux jours de « l'école des entraîneurs-magiciens » étrangers en Afrique, français en l'occurrence. Avec l'arrivée de Walid Regragui sur le banc des Lions de l'Atlas, le Continent file au Qatar-2022 avec une mention si bien particulière… le « Made In Local » ! Les traditions sont, le plus souvent, faites pour être respectées. Dans le football, elles sont « inventées » pour être bousculées. L' »Empire Foot » n'a jamais de règles bien établies, ni de « Special One » atemporel. Cristiano Ronaldo et José Mourinho, pour ne citer que ces deux figures emblématiques, l'assureront bien évidemment ! Toutes les bonnes choses ont une fin, les mauvaises aussi. « Nous irons au Mondial pour honorer le football marocain. Je suis un vainqueur. Si je viens en équipe nationale c'est pour gagner. J'espère transmettre cette mentalité et cette rage de vaincre aux joueurs », lança « Walid » dès sa première « entrevue » avec les médias, sous sa toute nouvelle casquette de sélectionneur national. Ces énoncés, si courts soient-ils, sont bien de nature à faire table rase d'un passé, plus ou moins spéculatif, laissant parfois place à un scepticisme général quant à la posture de cette sélection nationale lors du rendez-vous qatari. Bref, de nouvelles perspectives sont ouvertes et les tons commencent déjà à changer. Ancien Lion de l'Atlas, ce latéral droit était connu pour sa discipline tactique sur les pelouses et sa conduite exemplaire hors des terrains. Devenu par la suite sélectionneur adjoint de Rachid Taoussi, il avait eu tout le temps d'observer de tout près un championnat marocain et un style de jeu, qui n'est pas toujours facile à schématiser. Points à déduire de cette expérience: Donner la chance aux jeunes et gagner… sans forcément bien jouer. La fameuse conférence de presse, où il parlait de performance « Ladda, Ladaa », après le titre de champion d'Afrique avec le WAC illustre parfaitement cette philosophie. Fort de cette brillante expérience avec les Rouge et Blanc avec lesquels il était également sacré champion du Maroc et finaliste de la Coupe du Trône, et, bien avant, avec le FUS de Rabat, « Walid » entend bien « importer » toute cette mentalité de champion, cette rage de vaincre et sa grinta au sein de son groupe, mais surtout mettre fin à certaines « thématiques » qui ont fait couler assez d'encre. Les circonstances ne sont pas, certes, les mêmes mais ce qui rend plus crédible et « efficace » l'idée d' »installer » un « fils du pays » à la tête de la sélection nationale, c'est l'expérience réussie de deux autres ex-Lions… Ils le sont toujours. Après avoir disputé la Coupe du Monde en tant que capitaines respectifs des Lions de la Téranga et des Lions indomptables, Aliou Cissé et Rigobert Song vont, cette fois-ci, attaquer les choses d'un autre angle. Ils ont un peu le même charisme et presque des styles identiques, même physiquement. Cissé, l'homme calme a réussi à bâtir une équipe sénégalaise, mêlant jeunesse, force et technicités. Emmenés, notamment par un Sadio Mané, actuel ballon d'or, les Sénégalais, semblent plus que jamais capables d'aller le plus loin possible dans la compétition phare du ballon rond mondial. Galvanisés par le titre de champions d'Afrique et par une qualification au Mondial contre les mêmes Egyptiens de Mo Salah, frère-ennemi de Mané, les actuels N°1 africains sont en nette progression. Ils ont disputé les quarts de finale de la CAN-2017, la finale en 2019, avant de graver la première étoile de leur pays en 2022. Et dans toute cette histoire, la touche d'Aliou était claire. Il est parvenu, comme il gérait ses coéquipiers du milieu de terrain et parfois même de la défense, à rendre homogène un groupe de jeunes talentueux, qui évoluent dans les plus grands championnats européens… c'est pas toujours évident. Nommé suite à « l'échec » à la CAN que le Cameroun n'a pas réussi à remporter chez lui et devant son public, le vieux Lion Rigobert Song a créé une belle sensation, en écartant l'Algérie sur sa pelouse pour rallier cette Coupe du Monde 2022. Cette qualification dans les dernières secondes restera dans les têtes de tout le monde, surtout celle du président de la Fédération camerounaise, Samuel Eto'o, qui, lui, place la barre un peu plus haut. Il déclare à chacune de ses sorties que l'Afrique peut remporter la Coupe du Monde… Et s'il avait raison ? C'est ainsi que le recordman Lion indomptable avec 137 participations, tient sa toute première belle performance dans sa nouvelle tenue, après une première mission accomplie. Après la désillusion des Black Stars lors de la CAN Cameroun, où ils ont quitté la compétition dès le premier tour, rares ceux qui croyaient vraiment que les coéquipiers des frères Ayew étaient capables de valider leur billet pour le Qatar. Après avoir croisé le fer avec le Nigeria, les choses sont devenues plus compliquées. Venu à la rescousse, Otto Addo (46 ans), ancien joueur du Borussia Dortmund, est parvenu à réaliser l'exploit. Il a écarté les Super Eagles, grands favoris. Suite au limogeage de Mondher Kebaier, Jalel Kadri a pris la tête de la sélection tunisienne. Il réussit à envoyer les Aigles de Carthage à la Coupe du Monde 2022 et de quelle manière ! A 50 ans, l'ancien entraîneur du stade Tunisien participe à son premier mondial après avoir sorti le Mali (0-1 ; 0-0) lors du dernier tour qualificatif. Au niveau des clubs et dans un sens plus « intra-continental, la donne semble être toujours la même. Toutes les formations africaines ayant été sacrées ces dernières années, l'ont fait sous la houlette d'entraîneurs africains. Houcine Ammouta, Walid Regragui, Tarik Sektioui, Pitso Mosimane, Florent Ibenge, Lassaad Chabbi… Ils seront cinq à diriger les cinq sélections africaines au Mondial qatari. Une première. Ce quintette met aussi en relief la réussite des stratégies et des programmes de formation des entraîneurs africains de la CAF.