En avril prochain, le monde souterrain fera l'objet d'une conférence internationale à Agadir Contribuer à la valorisation du patrimoine souterrain à travers l'exemple de la grotte de Wintimdouine, située dans le système karstique de Tasroukht à Idaoutanane (Agadir) et développer les potentialités géotouristiques de ce site grâce à une autogestion de ses ressources naturelles visant le désenclavement des populations rurales, tels sont les objectifs principaux du «Speleo2008 », 1er congrès international sur la spéléologie scientifique et touristique qui se tiendra à Agadir du 23 au 26 avril sous le thème «Le monde souterrain: patrimoine et vecteur de développement humain durable». «Wintimdouine est l'une des trois plus grandes grottes de l'Afrique avec un réseau entre 18 et 20 km en longueur cumulée et une rivière souterraine aussi importante. Il s'agit de la grotte la plus étudiée au Maroc. C'est aussi la principale source en eau de toute cette région montagnarde connue pour son aridité. Malheureusement, cette grotte souffre d'une certaine négligence et d'une anarchie dans l'exploitation», explique le Pr. Alaeddine Belfoul, président du Groupe scientifique multidisciplinaire pour l'étude et la valorisation des grottes du Sud marocain (2GSM), organisateur de cet événement. Aujourd'hui, le Maroc, à l'instar d'autres pays, est appelé à adopter une politique d'autogestion capable de drainer des fonds, d'entretenir et de développer cette richesse naturelle tout en impliquant les scientifiques et la société civile. Du fait, qu'il recèle un nombre important de grottes dans le Rif, les Haut, Moyen et Anti-Atlas et les littoraux méditerranéen et atlantique. «Il existe actuellement quelques sites aménagés : la grotte de Friouatou à Taza et de Wintimdouine. Les populations sont relativement respectueuses de ces espaces souterrains qui leur assurent un revenu direct ou indirect ou encore qui constituent pour eux un réservoir en eau très apprécié. Mais parfois, l'intervention des autorités est nécessaire pour protéger certains sites pour leur valeur patrimoniale. C'est le cas des grottes et cavernes archéologiques de la région de Rabat (Témara, Harhoura, Dar Soltane…), de Casablanca (carrière Thomas, Sidi Abderrahmane, Ahl Aloughlame), de Nador (Ifri N'Ammar)…», précise Alaeddine Belfoul. Selon notre expert, plusieurs départements ministériels possèdent des sections ou des services dont les tâches sont la promotion, la protection et la valorisation du patrimoine naturel (ministère de la Culture, l'Institut national des sciences de l'archéologie et du patrimoine, le ministère de l'Energie et des Mines, de l'Eau et de l'Environnement…). Cependant, il y a un manque de coordination. Une des recommandations qui sera d'ailleurs faite lors du colloque est la création d'une structure gouvernementale qui puisse centrer ses efforts et dont la mission sera de remédier à la destruction et à la négligence de tout héritage patrimonial culturel ou naturel. Aussi, 2GSM profitera du congrès «Speleo2008 », pour lancer un appel aux autorités nationales et locales afin qu'elles soutiennent le projet d'intégration de la grotte de Wintimdouine dans le patrimoine naturel et scientifique national et mondial de l'UNESCO. Parallèlement, 2GSM propose un plan de développement régional durable visant à promouvoir la gestion intégrée et participative de cette ressource en sensibilisant la population locale, développer une gestion rationnelle de l'eau de l'agriculture locale, équiper le site tout en conservant l'environnement naturel et intégrer le site dans le circuit du tourisme d'arrière-pays. «Le tourisme souterrain gagne beaucoup de popularité et contribue au développement économique local, en particulier si le site karstique est protégé et bien équipé», conclut Alaeddine Belfoul. -------------------------------------------------- Dégradation des grottes… Les grottes se développent généralement dans les terrains solubles par l'action de l'eau agressive dissolvant la roche calcaire et la croissance des spéléothèmes (stalactites, stalagmites, draperie de caverne, etc.). Dans ces domaines karstiques, presque toutes les eaux de surface s'infiltrent dans les grottes apportant les aliments frais nécessaires pour soutenir la vie biologique composée d'une myriade d'espèces sensibles, telles que les poissons aveugles, les crustacés, les insectes de caverne.... Toutes ces composantes minérales ou animales survivent dans un environnement périlleux et s'exposent à de sérieuses menaces. Dans leur parcours, ces eaux peuvent drainer des aliments et des polluants fortement toxiques pouvant dévaster sévèrement l'écosystème en entier. En outre, des spéléothèmes sensibles, qui ont pu avoir pris des centaines à des milliers d'années pour se développer, sont facilement interrompus par de grandes coulées et des débris dans les grottes, par les actes des touristes négligents et des chasseurs de souvenir. Par ailleurs, les niveaux aquifères des karsts sont une source importante d'eau potable très vulnérable : des activités humaines peuvent conduire à leur détérioration ou à leur tarissement par une utilisation excessive.