Les startups marocaines ont réussi à mobiliser un montant total de 17 millions de dollars en 2023. Une réalité amère que les experts attribuent à l'absence d'un environnement d'un investissement structuré et plus rassurant. Détails. Les projets innovants en Afrique continuent de susciter l'intérêt des investisseurs. En témoigne les 2,9 milliards de dollars des investissements que les startups africaines ont attirés en 2023, selon le site spécialisé « Africa : The Big Deal » qui surveille au quotidien les levées de fonds à travers le continent. Malgré son importance, ce chiffre peine à être conséquent pour le Maroc. Sur ce montant total des financements, les jeunes startupeurs marocains n'ont réussi à capter que 17 millions de dollars, soit 0,5%, se positionnant ainsi très loin par rapport au Kenya, l'Egypte, l'Afrique du Sud et le Nigeria, qui s'accaparent à eux seuls 87% des levées de fonds sur le continent. Ce montant ne représente que 0,4% des 3,2 milliards de dollars mobilisés par l'ensemble des startups africaines en 2023. Des experts tel que Nabil Hassoune, fondateur & PDG de Normalis International Group (GRO'INO), le qualifie de très faible voire d'incompatible par rapport à la position du Maroc en tant que 4ème économie africaine, d'autant plus qu'il ne reflète pas la stature économique du Maroc sur le continent africain, avec une contribution à hauteur de 6% au PIB global de l'Afrique. D'ailleurs, ce constat intervient dans un contexte où les startups marocaines sont traitées comme toute autre entreprise du moment que le pays n'a toujours pas développé un cadre juridique adapté aux spécificités de ce genre d'initiatives et lui offrant un mode de financement et d'accompagnement plus agile. Les entrepreneurs appellent, depuis un bon moment, à instaurer un cadre juridique adapté offrant aux startups des facilités avantageuses depuis l'accès au financement de démarrage et de recherche jusqu'au recrutement.
Handicaps d'ordre structurel Au regard de l'expert, cette réalité est le fruit d'une combinaison de plusieurs facteurs résultant d'un écosystème des investisseurs en capital-risque insuffisamment développé mais également des mentalités d'investissement marocaines, « accoutumées à des placements de rente », entravant de ce fait l'essor économique du pays. De son côté, Mohammed Benchekroun entrepreneur, Professeur d'économie et Managing Partner de NBS Invest, Cabinet de conseil et d'accompagnement des investisseurs étrangers au Maroc et en Afrique, estime que la part du Maroc dans les investissements captés par les startups africaines est révélatrice d'un écosystème économique qui n'encourage pas suffisamment l'émergence de ces initiatives. « Les handicaps qui caractérisent l'écosystème marocain notamment, la lenteur administrative, les difficultés d'accès au foncier, la corruption, le manque de confiance entre les institutions et la société civile touchent principalement les startups et les petites structures et les empêche, par conséquent de grandir », commente-t-il, soulignant que « les levées de fonds d'investissement nécessitent un cadre adapté mais surtout rassurant, chose qui n'existe pas pour les startups marocaines ».
Cadre rassurant
L'expert, qui reconnait le potentiel de croissance énorme des startups, estime, par ailleurs, que le marché national des startups n'a pas encore atteint le socle de maturité requis où l'encadrement et l'intégration des écosystèmes organisés est au rendez-vous. Ainsi, il rappelle la nécessité de développer un climat favorable, tout en mettant au clair les indicateurs de développement et de performance des startups pour attirer le plus d'investisseurs possible. Même son de cloche auprès de Nabil Hassoune qui souligne l'impérieuse nécessité d'un engagement plus marqué et d'un soutien renforcé de la part des grands organismes financiers marocains, des investisseurs institutionnels, des acteurs privés, des autorités publiques à savoir : en premier lieu le ministère de l'Inclusion Economique de la Petite Entreprise de l'Emploi et des Compétences et le Groupe CDG ainsi que la sphère politique envers les startups marocaines. L'idée étant, selon ses termes, est de mettre en place un environnement d'investissement plus structuré, plus motivé, plus généreux et plus audacieux et libérer tout le potentiel des entrepreneurs marocains afin de donner une vraie dynamique pour l'économie marocaine.
Financement des startups : Ghita Mezzour fait appel à la CDG pour élaborer des offres innovantes Les appels à doter les startups d'un accompagnement sur mesure et d'un appui financier adapté se multiplient ces dernières années. Conscient du rôle de ces initiatives innovantes dans l'accélération de la richesse et le rayonnement du Maroc à l'échelle africaine voire mondiale, le gouvernement s'efforce à élaborer des offres de financement innovantes. C'est dans cette optique que la ministre de la Transition numérique, Ghita Mezzour, s'est réunie en fin de semaine dernière au siège de son département avec le Fonds Mohammed VI, représenté par son Directeur général Mohamed Benchaâboun, la Caisse de Dépôt et de Gestion (Groupe CDG), représentée par son directeur, Khalid Safir et CDG Invest représentée par Yassine Haddaoui. Cette rencontre s'inscrit dans le cadre de la mise en œuvre de l'offre startup visant à structurer et à mettre en œuvre une offre globale d'accompagnement et de financement dédiés. Les discussions ont porté à l'examen des voies de soutien aux startups dans leur processus de développement. À l'issue de cette rencontre, « il a été convenu de structurer des véhicules d'investissement conjoints afin de soutenir les startups dans leurs levées de fonds et les appuyer dans leur développement », fait savoir la ministre de tutelle, Ghita Mezzour. Il est à noter qu'une convention-cadre a été signée, le 26 décembre dernier, entre le ministère de la Transition numérique, la CDG et la CDG Invest . Ladite convention est destinée à favoriser la croissance des startups grâce à des dispositifs adaptés aux besoins des entrepreneurs.