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Les ratés de l'Histoire
Publié dans Le temps le 20 - 12 - 2010

Retour sur ces grands rendez-vous manqués qui ont émaillé l'Histoire de notre pays.
Une horde de jeunes diplômés frappent chaque année aux portes d'entreprises désireuses d'embaucher. Entre le management et cette jeunesse pleine d'espoir s'engage un dialogue. On jauge le postulant, des questions fusent, on teste son aptitude à l'expression claire, sa cohérence intellectuelle. Et puis on interrompt l'entretien en invitant l'ex-futur employé à attendre un coup de fil qui ne viendra jamais. Les situations comme celle-ci ne se comptent plus au Maroc. Les jeunes, pur produit d'une faillite de l'Education nationale, butent encore et toujours sur le diktat francophone de la réussite en entreprise. En cause, une décision plus criminelle que légère. En 1977, Azzedine Laraki, alors ministre de l'Education nationale, a une fulgurance: l'arabisation. «Désormais, tranche-t-il, nos jeunes suivront leurs cours jusqu'au baccalauréat en langue arabe». A l'époque, la Gauche règne sur les lycées, distillant une pensée marxiste-léniniste que mâtine un besoin de laïcité. C'est le temps des grandes envolées lyriques. La version française du grand Capital circule en sous-main. On se veut révolutionnaire, intellectuel et athé. Ultraconservateur, Laraki concocte une riposte à l'élan gauchiste d'une génération plus peace and love que subversive. Il décrète l'enseignement primaire et secondaire en arabe, élimine l'étude de la philosophie (remplacée par des cours d'éducation islamique) et engendre l'anomalie originelle. De facto, il rend obsolètes plusieurs générations d'étudiants. Le Maroc ne s'en remettra jamais. Dans un contexte post-colonial, l'heure est au nationalisme tout feu tout flamme.
Un acte, de multiples conséquences
En 44 ans de protectorat, un certain chauvinisme a eu le temps de mariner. Au lendemain de l'Indépendance, dans l'euphorie d'une liberté reconquise, des décisions sont prises dont certaines s'apparentent à de véritables rendez-vous manqués avec l'Histoire. Habitués à un colon espagnol moins interventionniste dans sa gestion du territoire, la population rifaine, comme le note Ansaf Ouazzani, «avait réussi à sauvegarder, au fil des siècles, une certaine indépendance». Or, lorsque le pays recouvre sa liberté et que la jeune administration marocaine étend un cadre administratif et fiscal dirigiste sur la région, c'est le clash. Le nouveau pouvoir central est vécu comme une ingérence. Eclatent alors les rancœurs. Entre 1958 et 59, les Rifains se soulèvent. La répression sera foudroyante et résultera d'un divorce définitif entre l'état de l'époque et un nord marqué du sceau de l'insoumission. La région, abandonnée, connaîtra une traversée du désert de 40 ans, avant d'être reprise en main par Mohammed VI. Quarante ans de déshérence qu'une légère dose de diplomatie aurait gommé de l'Histoire.
Il est des instants comme ça où, sans vaciller, croyant régler un problème ponctuel, un homme, une institution, un ministère déclenchent un séisme dont les vibrations s'étendent au delà de la problématique visée. Eté 1981, l'économie est exsangue, les jeunes, encore eux, luttent, la faim au ventre, contre la désillusion d'un avenir bouché, d'un marché de l'emploi miteux. Rébellion. On se déchaîne contre les agents de l'ordre. La meute s'anime. Koumira hurlent-ils, dévastant voitures et installations publiques. La siba ainsi exprimée sera brisée avec une rage féroce. Des membres seront amputés, des visages défigurés... La répression est disproportionnée. Acculés à la retraite, les jeunes remisent leurs doléances aux calendes grecques. Driss Basri, grand auteur de l'intervention musclée se frotte les mains. Satisfait, il lui semble avoir remporté une bataille ponctuelle. Or, le ministre de l'Intérieur de l'époque ignore qu'en sévissant de la sorte, il a emmailloté une génération dans la camisole de l'hésitation, de la peur, du manque d'audace. L'ombre de la matraque a réduit une fougue collective en complexe durable. Aujourd'hui, on se plaint d'un déficit de créativité ; l'esprit d'entreprise ne décolle pas dans ce pays. Le gouvernement a beau multiplier les initiatives visant à libérer le «génie» marocain, peine perdue. Il semblerait que cette veine imaginative ne réagisse à aucun électrochoc. Ahmed Réda Chami, ministre de l'Industrie, du Commerce et des Nouvelles Technologies, champion de l'ambitieux Maroc Numérique 2013, vient de noter son programme Génie d'un «5 voire 6 sur 10» (voir article en pages 32 et 33). Piètre bulletin pour un projet dont l'essence même renvoie à l'innovation, à la créativité, à la libération d'une certaine vision. Malgré les efforts déployés pour encadrer, financer, orienter de jeunes porteurs d'idées dans un cadre créateur de valeur , souvent, la dynamique se heurte à une apathie doublée moins d'une volonté de créer que d'exécuter. En manquant le rendez-vous d'une négociation efficace avec la jeunesse, Basri a enfanté une crise de l'«audace positive» enfonçant ses ramifications dans le présent.
Quand on pose un lapin à l'Histoire
Trop facile. Trop horrible. C'est d'une société entière que l'on parle, une société qui vit, qui respire de par les manifestations diverses de son existence. Art, culture, économie, sport, politique. Les ratages historiques n'ont épargné aucun segment d'activité. Juin 2004, Baddou Zaki, chevauchant une providence inouïe, emmène des Lions de l'Atlas inexpérimentés, groupe de «mercenaires» rassemblés à la hâte, en finale de la Coupe d'Afrique des Nations. L'heure est à l'allégresse. Le match se déroule devant les yeux d'une population prête à faire exploser sa joie. Nous perdons. La défaite plongera le football marocain dans la pire crise qu'il ait jamais connue. Eliminations précoces lors de compétitions internationales, échecs de qualifications, valses des entraîneurs, du rififi à la tête de la fédération, et puis… un dernier épisode surréaliste rédigé par la plume du coach belge Eric Gerets, celui-là même qui a émargé à 250 000 euros par mois, autre scandale.
Des gâchis de cet acabit, notre pays n'en est que trop émaillé. Mélange de mauvaise fortune, de hâte brouillonne et de réflexes circonstanciels, ces ratages verrouillent le passé, grèvent le présent et hypothèquent l'avenir. En 2001, l'Etat cède 35 % du capital de Maroc Télécom à Vivendi. A l'époque, on avait du mal à cerner l'impact du cellulaire sur l'avenir de l'opérateur. Croyant faire l'affaire du siècle en bradant une administration poussiéreuse, l'Etat livre ses parts au géant pour une bouchée de pain (2,3 milliards de dirhams). Erreur fatale. Sans l'appui, ni logistique, ni technique de la maison mère française, IAM voltige et avec, une somme incalculable de dividendes dont le Trésor marocain ne verra jamais la couleur.
Qui paie la note de ces anomalies ? Un citoyen tronqué dans son ambition, un pays sacrifié sur l'autel de décisions irréfléchies, caricaturales… des homicides historiques. Les cas abondent. De la privatisation bâclée des joyaux du royaume au Plan d'ajustement structurel de 1983, de la vitrification des insurgés du Rif au flop de l'Alternance, de la nationalisation de 2M à l'asphyxie de l'amazighité, les rendez-vous manqués, hélas, ne manquent pas. Alors, il est un choix à faire. Se barder de pis-aller pour nier l'Histoire, se mettre des œillères, éviter de remuer le couteau dans la plaie , ou bien revenir sur cette série d'instants où tout bascule, ou ce qui devait être ne fut pas. Décrypter le passé pour exorciser le présent, telle est l'approche choisie par le Temps.
Et si on remontait le temps ?
«Quiconque oublie son passé est condamné à le revivre.» Le dicton fait certes cliché. Nous ne nous en revendiquons qu'à moitié. Oui pour l'Histoire, non pour sa sublimation. A mi-chemin entre un monde ancien et une nouvelle ère, tandis que nous négocions une transition collective vers «l'émergence», il est primordial d'isoler ces décisions-phares qui n'auraient jamais dû être prises. Vision sélective du passé ? Nous choisissons de qualifier l'entreprise d'inventaire pertinent, celui d'erreurs à ne plus commettre. Levons donc le voile sur les cesrendez-vous manqués avec l'Histoire et, si d'aventure, nous nous retrouvions devant un dilemme fondateur, pourquoi alors ne consulterions-nous pas ce bréviaire dans l'optique d'éviter le pire ? Ce faisant, naîtra probablement la possibilité d'une rédemption faites de «Si». Et si la Gauche n'avait jamais été délégitimée ? Aurions-nous été contraints de barrer la route aux islamistes ? Et si la campagne d'assainissement menée par Basri n'avait pas anesthésié l'investissement ? Aurions-nous pu grappiller quelques points de croissance supplémentaires ? Et si nous ne nous étions pas engagés dans la Guerre des Sables, mènerions-nous une bataille froide contre l'Algérie, cet éternel frère-ennemi ? Et si Ben Barek, la Perle Noire avait éclaboussé les observateurs de son talent à l'ère des bouquets numériques, le monde qualifierait-il Pelé de Greatest-of-all-time (meilleur de tous les temps) ? Allons donc, trêve de remords. Ce qui se fit naguère est irrécupérable. Tâchons au moins d'en garder un souvenir lucide et éclairé. Dans l'ordre d'importance qui nous paraît approprié, place aux rendez-vous manqués de notre Histoire.
Réda Dalil et Abdelkader El-Aine
Les grands rendez-vous manqués
La guerre des Sables
La perte de Tindouf
Tout commence en 1952. L'administration française intègre les régions de Tindouf et Colomb-Béchar aux départements français d'Algérie. La décision n'est pas du goût d'un Maroc fraîchement décolonisé et soucieux plus que jamais de rasseoir sa souveraineté territoriale. En 1961, Mohammed V arrache une promesse. Celle de Ferhat Abbas, chef du gouvernement provisoire de la République algérienne. Il est admis qu'au lendemain de l'indépendance algérienne, Tindouf et Colomb-Béchar seraient restitués au royaume. Retournement de situation, une coalition menée par Ahmed Ben Bella chasse Abbas du gouvernement. Les promesses n'engageant que ceux qui veulent bien les entendre, il n'est plus question d'une rétrocession. L'escalade débute. Fin septembre 1963, feu Hassan II envoie une escouade d'auxiliaires à l'assaut de Tinjoub et Hassi Beida. Les deux villages tombent dans l'escarcelle marocaine. Hormis le soutien militaire de Cuba, l'Algérie est débordée par l'organisation militaire marocaine. Nos troupes, menées par Driss Ben Omar el Alami parviendront jusqu'à 12 kilomètres de Tindouf. Le cessez-le -feu définitif sera signé le 20 février 1964 suite à la médiation de Hailé Sélassié et Modibo Keita. Néanmoins, le froid est jeté et aucune entente véritable ne s'installera jamais entre le Maroc et l'Algérie.
Arabisation
Récit d'une régression
Reste-t-il quelque notion à ajouter à la débâcle du millénaire ? L'arabisation. En 1977, Azzedine Laraki, alors ministre de l'Education nationale, décide d'arabiser toutes les matières d'enseignement, scientifiques et humaines dans le primaire et le secondaire. Commence alors une hécatombe culturelle. Bercés pédagogiquement par l'arabe classique, une couvée de jeunes accède au cycle supérieur pour buter contre un rempart infranchissable : la langue française. La dichotomie ainsi créée hypothèque l'avenir de générations entières. Car, tandis que les bases de la connaissance s'inculquent en arabe, la voie de la réussite face au marché de l'emploi se fait en français ou ne se fait pas. L'enseignement public devient synonyme d'échec et écluse chaque année plus de 30 % du budget de fonctionnement du royaume. Une déconfiture sans nom. Le système donne naissance à une société à double vitesse.L'école ne garantit plus l'égalité des chances. Les parents aisés optent massivement pour le privé, formant une élite francisée acquise à tous les privilèges. Dans le panthéon des grands rendez-vous manqués de l'Histoire, l'arabisation, sans doute, en est le pilier majeur.
Assainissement
La confiance ébranlée
Au lendemain d'un Plan d'ajustement structurel (1984-1994) oppressant, le Maroc gît dans les décombres d'une grave crise économique et éthique. Les rapports de la Banque mondiale sont formels dans leur sentence. Le pays est mal administré, gangrené par la corruption et, le nord enclavé, sert de plaque tournante à un marché florissant de narcotiques. Naît alors le concept d'assainissement. Devant la pusillanimité du Premier ministre Abdellatif Filali, du ministre des Finances Mohamed Kebbaj et Driss Jettou alors ministre du Commerce, Driss Basri se fait carnassier et s'approprie la mission. Le ministre de l'Intérieur a des comptes à régler. Initialement destinée à parer à la filière drogue nordiste, la campagne, sous l'impulsion de Basri, se concentre sur Casablanca : berceau des plus grandes fortunes du pays. S'ensuivra un des épisodes les plus traumatisants de l'Histoire. Basri sort l'artillerie lourde. Les condamnations se suivent, les geôles regorgent de commerçants et d'industriels accusés de détournement, blanchiment, évasion fiscal,etc. Abderrahmane Amalou, alors ministre de la Justice est confondu, il adresse une supplication à feu Hassan II : «Il n'y a plus de place dans les prisons, le surpeuplement carcéral est intolérable». Les interventions fusent au profit de notables condamnés. Le capharnaüm gèle l'économie, les investissements dépérissent tandis que perquisitions, rafles, arrestations et amendes s'accumulent. Face au chaos que provoque l'assainissement et, cédant au lobbying de Jettou et Kabbaj, tous deux proches des milieux d'affaires fassis de la capitale, feu Hassan II décrète l'abandon de la curée et ordonne une amnistie générale.
Mondial 2010
Le rêve brisé
Saad Kettani, porteur d'une vision, celle d'un Mondial désiré par tout un peuple. On le croyait parachuté dans un monde qui n'est pas le sien :le sport. L'héritier Kettani, issu d'une saga d'illustres banquiers, propriétaires de Wafabank, a le port altier. Il détonne par ses costumes trois pièces et son panache. Son approche est anglo-saxonne. Le dossier qu'il axe sur la légitimité historique du royaume, ses anciennes gloires, sa vision, suscite l'optimisme. On y croira jusqu'au bout. Ne v'là t-il pas que Nelson Mandela choisi le jour des délibérations pour faire une apparition très solennelle. Dans la nuit, la Concacaf fait volte-face. L'affaire est pliée. C'est d'une seule et misérable voix que le rêve s'évapore. L'organisation d'une Coupe du Monde aurait eu l'effet d'un accélérateur économico-social. Il n'en fût rien. Le rendez-raté par excellence.
Mehdi Ben Barka
La vérité impossible
Figure historique du Mouvement national sous le protectorat, leader de l'opposition au début du règne de Hassan II, son assassinat reste l'une des grandes énigmes de l'Histoire. Né en 1920 à Rabat dans une famille de petits fonctionnaires, Mehdi Ben Barka a fait des études de mathématiques à Alger et devient professeur de lycée. Proche du Palais, il enseigne aussi au Collège royal. Il a le futur roi Hassan II parmi ses élèves. Condamné à mort en 1963 suite à sa position dans le conflit frontalier opposant le Maroc et l'Algérie, il s'exile, vivant entre Genève et le Caire. Il est notamment chargé d'organiser la conférence tricContinentale qui doit se réunir à La Havane en 1966. Enlevé le 29 octobre 1965 à Paris, son corps ne sera jamais retrouvé. Le Maroc alors en pleine reconstruction perd un génie qui aurait pu apporter une pierre à l'édifice.
L'Alternance
Le waterloo de la gauche
L'alternance a un nom, ou plutôt une décision, celle de Abderrahman Youssoufi d'accepter la proposition de feu Hassan II. Nous sommes en 1998, pressentant la fin, le monarque a cru bon redonner du souffle au jeu politique en ouvrant les portes du pouvoir à l'opposition. Quarante ans de lutte, quarante ans de contestation, la gauche a fini par susciter la foi en l'avenir d'une base fidèle, pleine d'espoir. L'accession à la Primature de Youssoufi précède l'arrivée de roi. La quasi-simulatanéité des deux événements n'excuse pas l'attentisme du gouvernement d'alternance. D'aucuns arguent que l'action politique de la gauche a été phagocytée par les quadras du Palais. Mais enfin, quatre ans de pouvoir, ça suffit à cataloguer une formation politique. Ratage de l'assainissement des administrations, chômage endémique, absence de cadre incitatif à l'investissement, un tissu industriel plombé par les grèves. Bref, Waterloo. Pis, en répétant que l'échec de l'alternance ferait le lit de l'islamisme, Youssoufi, en sus d'avoir délégitimé l'option gauche au pouvoir, finira par faire le lit des Islamistes. Rétrospectivement, la parenthèse alternance au pouvoir explique l'effritement actuel des partis de Gauche, parasitant pour de bon, le diptyque droite-gauche propre à tout système démocratique normalement constitué.
PAS (Plan d'ajustement structurel)
L'asphyxie
1965-1980 : période faste pour le royaume. Les cours des dérivés des phosphates flambent. Enhardis, les thuriféraires du pays se lancent, à coût d'endettement, dans de faramineux programmes d'investissements expansionnistes. La croissance moyenne, frisant les 6 %, facilite l'accès à l'emprunt. De moins de 200 millions de $ en 1973, la dette passe à 2035 millions en 1978. Or, dès 1980, les prix des produits énergétiques s'effondrent, les liquidités disparaissent et les taux d'intérêt crèvent le plafond. Conséquence : une recrudescence sans précédent de l'endettement et de son perfide pendant, le service de la dette. Faisant face à la dégradation des finances publiques, le gouvernement décide, en 1983, de livrer son sort au FMI (Fonds monétaire international). C'est la saignée : réduction des dépenses de l'Etat, dévaluation du dirham, démantèlement des barrières douanières, fin des subventions… La cure est rude. Socialement, elle est ignoble. Entre 1980 et 1986, les prix de quatre produits de base (le sucre, la farine, le gaz et le lait) augmente de 133 %. A côté, les salaires enregistrent une hausse de 53 %. L'équation de l'asphyxie durera dix ans et décimera une classe moyenne naissante.
INFOCOM
Médias : La réforme avortée
Alors que l'Intérieur muselait la presse, un colloque national sur l'information et la communication (INFOCOM) se tient à Rabat du 29 au 31 mars 1993. Y prennent part, en plus des journalistes, des leaders politiques tels feu Ali Yata et Mohamed ElYazghi. Ces Premières assises du domaine étaient porteuses d'enivraints d'espoirs. Elles ont débouché sur des résolutions mirifiques qui resteront lettre morte. De réforme en réforme, le secteur, vraisemblablement sinistré, continue de souffrir de mille maux. Recul des ventes, régression de la liberté d'expression, absence d'une loi sur l'accès à l'information, condamnation de journalistes à de lourdes amendes et à la prison ferme, etc. En somme, l'INFOCOM n'est plus qu'un souvenir lointain, un ratage de taille.
2M
Nationalisation toute !
Un soupçon de verve, une louche d'irrévérence et un poil de subversion. 2M international c'était tout cela et bien encore. C'est en 1989 qu'atterrit sur un PAM (Paysage audiovisuel marocain) anesthésié par la RTM, cet OVNI de fraîcheur. Liberté de ton, indépendance de l'information, la chaîne accède très vite au statut de phénomène culturel. L'engouement pour la grille des programmes est tel qu'on plissait les yeux pour tenter de distinguer des bribes de formes sur les images cryptées. Musique, cinéma, talk shows, jeux télévisés, 2M reléguait son aînée (Rtm) au rang de relique fossilisée. Las, une gestion catastrophique des finances de la chaîne débouche sur une révision des prises de participation. En 1996, l'Etat s'engouffre dans le capital de la chaîne (70 %) et 2M entamera sa descente aux enfers. Des directions se succée deront avec plus ou moins de réussite. Saïl et Benali tenteront de réanimer ce grand corps malade d' Aïn Sebaa. En vain, 2M ne reviendra pas dans le giron du privé et, à la superbe de ces premiers jours, la chaîne substituera une médiocrité quasi-constante. On se prend alors à rêver d'un cryptage express lors de la diffusion d'une telenovela doublée en darija.
CAN 2004
La coupe déborde
Le 14 février 2004, les yeux des Marocains sont rivés à la télé. Et pour cause. Le Maroc dispute la finale de la Coupe d'Afrique des nations, la deuxième de son Histoire après celle gagnée en 1976. Largement favoris après une demi-finale remportée haut la main face au Mali (4-0), les Lions de l'Atlas, menés par Baddou Zaki, sont victimes de leur excès de confiance. Ils perdent 2-1, mais cela n'a pas empêché des millions de Marocains de sortir dans la rue pour acclamer les héros. Néanmoins ce ratage laissera un goût des plus amers. Car, une fois éteints les lampions de ce «mini-succès», le football national plongera dans le marasme. S'en suit une longue traversée du désert, sanctionnée par les éliminations des grands rendez-vous footballistiques.


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