Bank Al-Maghrib, en collaboration avec la Banque mondiale, le Haut commissariat au plan et des prestataires étrangers spécialisés en sondage, ont réalisé une enquête d'envergure pour comprendre la perception des produits financiers par les citoyens marocains, leurs attentes, leurs appréhensions, leurs habitudes et tout simplement leurs connaissances en finance. Pourquoi une telle enquête ? Retour sur le contexte de l'étude pour bien en saisir les enjeux. Une construction solide repose sur des fondations solides. De même, faire de l'inclusion et de la connaissance une préoccupation majeure dans la stratégie de développement financière du Maroc passe d'abord par une meilleure protection du consommateur et par son éducation. C'est le premier pilier de cette stratégie. Le deuxième étant l'accélération des interactions financières entre agents économiques, et le troisième est le fameux hub financier casablancais. Il fallait donc dresser un état des lieux des connaissances pour partir sur des bases solides. La Banque centrale était représentée lors de l'exposé des résultats de l'enquête par Lahssan Benhalima, responsable de la Direction de la supervision bancaire. Pour lui, «le régulateur maîtrise parfaitement les paramètres de l'offre financière. Cette dernière s'améliore et s'intensifie parallèlement à la concurrence. Mais la demande ne l'est pas encore. Cette enquête vient donc combler ce vide. Nous souhaitons apprivoiser les attentes et donc comprendre la structure de la demande des produits financiers». Les résultats de cette enquête ont été collectés et traités et seront bientôt utilisés pour cibler les interventions de la Banque centrale et ses partenaires en matière d'éducation financière et, par ricochet, limiter certains risques comme celui du surendettement des particuliers plus avertis. Il s'agit également d'améliorer l'information financière, un sujet très cher à la Banque centrale. Le représentant de la Banque mondiale qui a coordonné cette enquête, l'économiste Siegfried Zottel, a pour sa part exprimé sa «satisfaction» de la démarche marocaine qui est inédite dans la région et qui témoigne du pragmatisme de la Banque centrale. Zottel a également cité Al Barid Bank comme exemple à suivre par plusieurs pays de la région. «L'effort fourni par Barid Al-Maghrib pour lancer un établissement bancaire autonome témoigne de la crédibilité du Maroc quant à son projet d'inclusion financière», souligne-t-il. Cette banque joue en effet un rôle important dans le recrutement par le système financier d'une population historiquement difficile à toucher. Le Marocain ne sait pas budgétiser ses finances Avant de détailler les résultats de l'étude, l'économiste de la Banque mondiale a rappelé que le Maroc dispose du taux de bancarisation le plus élevé d'Afrique du Nord et du taux de pénétration le plus élevé des crédits aux entreprises de la zone Mena. 41% de la population utilisent des produits bancaires formels. La majorité est, selon ses propos, «forte en choix de produits financiers». Les Marocains comparent différents produits et différents établissements bancaires et s'intéressent aux contrats qui leur sont proposés et aux conditions générales d'utilisation. Ils sont également prévoyants: ils pensent à leur avenir. Malheureusement, ils ne traduisent pas cela en actes, car le taux de pénétration des produits d'épargne reste faible, la retraite n'est que rarement planifiée et la budgétisation rudimentaire. En gros, le Marocain gère mal sa bourse au quotidien. L'enquête a également mis en avant quelques évidences de notre société où le monde rural est nettement moins desservi en produits financiers. Les jeunes et les femmes de ce milieu se sentent également oubliés du système. D'autres résultats de l'enquête sont pour le moins étonnants. Mais leur précision permet de bien cibler les actions futures des organismes chargés de cette difficile mission qu'est la mise à niveau financière des citoyens marocains. Perception des produits, connaissances de base, règlement des litiges, relation à l'épargne et réaction de la Banque centrale à ces résultats, on vous dit tout sur les habitudes financières des Marocains.