On voit fleurir ici et là, par les temps qui courent, des analyses à l'emporte-pièce, s'articulant sur des lectures superficielles de la loi organique de la Chambre des Représentants. Les articles 14 et 17 sont notamment mis à contribution pour leur faire dire ce qu'ils ne disent pas et, ce faisant, abonder dans le sens d'une espèce de catastrophisme constitutionnel. A les croire, au cas où le nouveau gouvernement ne verrait pas le jour avant le 25 de ce mois, le pays entrerait dans une configuration d'impasse constitutionnelle parce que les ministres élus députés (une dizaine) auraient l'obligation de démissionner du gouvernement ! Le sujet est trop sérieux pour se prêter à des constructions juridiques aussi légères. L'argument qu'ils invoquent en effet est que l'article 14 dresse une règle de principe affirmant l'incompatibilité entre l'appartenance concomittante à la Chambre des Représentants et au gouvernement. Or une analyse un peu moins hâtive de cet article 14 aurait conduit ces analystes à constater que l'article 17 (qui complète l'article 14) n'exige la démission dans un délai de 30 jours, du député en situation d'incompatibilité, que dans les cas limitativement et formellement prévus, des articles 13, alinéa 2, 14 alinéa 3, 15 et 16. Or aucun des articles de cette liste ne concerne les ministres élus députés. La loi est encore plus précise dans l'alinéa 2 de l'article 14 qui dispose : «Au cas où un député est nommé membre du gouvernement, la Cour Constitutionnelle déclare, à la demande du Président de la Chambre des Représentants, dans un délai d'un mois, la vacance du siège». En d'autre termes, la confusion dans certains esprits est due à la confusion entre deux situations très distinctes : le député désigné membre du gouvernement et le ministre élu député. Le premier cas – le seul traité par la loi organique - ne s'est pas encore présenté. On en reparlera lorsque le nouveau gouvernement sera formé et s'il compte des députés nouvellement élus. Quant au second cas, n'ayant jamais été envisagé par ladite loi organique, on en revient au droit commun et au bon sens, c'est-à dire à rappeler que ce qui n'est pas expressément interdit est licite. Il n'y a donc pas lieu de gloser à l'infini dans un débat d'existentialisme constitutionnel surfait.